Contamination radioactive dans une fonderie de Seine Saint-Denis

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25/07/2003

 

L'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) est intervenu, à la demande du Service technique interdépartemental d'inspection des installations classées (STIIIC) le 5 juin 2003 pour préciser l'état de la contamination d'un atelier, servant à fondre le plomb. Le four appartient à la société Budin, implantée à Aubervilliers (93). Les premières constatations ont été transmises au STIIIC, à la Direction générale de la sûreté nucléaire et de la radioprotection (DGSNR) et à la Direction des relations du travail (DRT) dans les jours qui ont suivi ; le rapport complet de l'intervention leur a été transmis, ainsi qu'à l'inspecteur du travail, à la fin du mois de juin.

 

Historique de la découverte de la contamination et premières observations

 

Le 19 mai 2003, le portique de détection de radioactivité installé à l'entrée du site de la société Métal Blanc à Bourg Fidèle (08) se déclenche au passage d'un camion. La présence d'un champ de rayonnement anormal au niveau de bacs de déchets industriels et d'une contamination locale du plancher du camion par de l'uranium est constatée par une société spécialisée en radioprotection. Les matières incriminées sont des crasses de fusion provenant de l'entreprise Budin à Aubervilliers.

 

Alerté, le STIIIC procède à une inspection des installations de la société Budin. Il apparaît que les crasses proviennent d'un four ayant servi à fondre le plomb contenu dans des têtes de theratron (matériel de radiothérapie) fournies par la société Debus à Villejuif (94). Ces têtes sont constituées d'une gangue de fonte recouvrant une enveloppe de plomb contenant une coquille d'uranium appauvri. Ces matériaux servent de protection radiologique car chaque tête contient, lorqu'elle est en service la source radioactive (cobalt 60 en général) utilisée pour les traitements de radiothérapie. En fin de vie du theratron, la source est retirée par la société Cis Bio avant envoi de la tête à la société Debus.

 

Les mesures effectuées par l'IRSN, le 5 juin 2003, confirment la présence de poussières contaminées par de l'uranium appauvri à proximité du four et, dans une moindre mesure, dans une grande partie de l'atelier.

 

Évaluation de l'exposition du personnel

 

Pour le personnel de la société Budin et de la société Métal Blanc, l'exposition externe est certainement très faible car les débits de doses mesurés à 50 cm du sol ne dépassent pas 0,12 microsieverts par heure dans les zones de travail ou de passage (soit 2 fois le bruit de fond naturel dans le voisinage de l'entreprise). Des examens biologiques sont en cours, dans les laboratoires de l'IRSN, pour apprécier l'exposition interne des personnels de la société Budin résultant de l'inhalation ou de l'ingestion de poussières contenant de l'uranium.

 

Pour le chauffeur du camion ayant transporté le chargement incriminé, le risque d'exposition externe est minime, des analyses pourraient êtres prescrites afin de s'assurer par ailleurs de l'absence de contamination interne.

 

L'uranium

 

L'uranium est présent naturellement dans l'environnement, en particulier dans les sols, les eaux, les végétaux, les êtres vivants. Il y a en moyenne 1 à 2 milligrammes d'uranium par kilogramme de sol, de quelques pourcents de microgramme (μg, 1 μg=0,001 mg) à quelques μg d'uranium par litre dans les eaux de surface, mais de quelques μg à quelques dizaines de μg d'uranium dans certaines eaux minérales. L'être humain a dans son organisme environ une vingtaine de milligrammes d'uranium naturel. On mesure 0,1 microgramme d'uranium par mètre cube d'air.

 

Les principaux isotopes de l'uranium naturel sont l'uranium 234, l'uranium 235 (fissile) et l'uranium 238.

 

Les doses aux populations dues à l'inhalation d'uranium naturel sont extrêmement faibles, de l'ordre d'un centième de microsievert (μSv) par an. Les doses dues à l'alimentation sont très faibles, de l'ordre de 5 μSv par an.
L'uranium, quelle que soit sa composition isotopique, présente, par ailleurs, une toxicité chimique après incorporation par ingestion ou inhalation, comme la plupart des métaux lourds.

 

L'analyse d'un échantillon de poussières contaminées par l'IRSN montre qu'il s'agit d'uranium appauvri en uranium 235 issu d'uranium naturel (minerai) et non d'uranium de retraitement provenant de combustible nucléaire usé.

 

L'uranium appauvri présente une activité par unité de masse (activité spécifique) plus faible que l'uranium naturel ; par conséquent, qu'à quantité égale absorbée et dans les mêmes conditions d'exposition, la nocivité radiologique de l'uranium appauvri est moindre que celle de l'uranium naturel.

 

Suivi de l'uranium

 

L'uranium, y compris l'uranium appauvri, est une matière nucléaire, au sens de la loi du 25 juillet 80 sur le contrôle et la protection des matières nucléaires qui fixe les modalités auxquelles doivent se soumettre les détenteurs. Ainsi toute utilisation, tout transfert, toute élaboration et tout transport d'uranium sont soumis à la réglementation qui en découle. En dehors de ses utilisations dans l'industrie nucléaire, l'uranium est utilisée dans l'industrie conventionnelle, la recherche ou le milieu médical pour ses propriétés physico-chimiques dont, en particulier, son aptitude à servir de blindage contre les rayonnements ionisants. Pour le compte du Haut fonctionnaire de défense du ministère de l'Économie, des Finances et de l'Industrie, l'IRSN veille à la bonne application des mesures prévues par la réglementation (suivi-comptabilité et protection physique). L'institut effectue des inspections et des visites techniques auprès des détenteurs de ces matières. La société de ferraillage Debus est notamment suivie dans ce cadre. L'IRSN mène actuellement une enquête sur d'éventuelles anomalies dans la gestion de cette matière par les entreprises concernées.