Programme OCDE-STEM

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28/09/2015

Dernière mise à jour en septembre 2015

​Le programme STEM (Source Term Evaluation and Mitigation), engagé par l'IRSN sous l'égide de l'OCDE/AEN, vise à mieux connaître le comportement de produits radioactifs susceptibles d'être rejetés dans l'environnement en cas d'accident de fusion de combustible dans une installation nucléaire. Commencée en 2011, la première phase du programme vient de s'achever au terme de quatre années et une seconde phase doit démarrer début 2016 pour une nouvelle période quadriennale.
 

Contexte et objectifs

Des incertitudes importantes, impactant l'évaluation des rejets dans l'environnement (ou terme source1), subsistent sur certains phénomènes complexes mis en jeu lors d'un accident de fusion du cœur d'un réacteur nucléaire à eau sous pression (REP). Il s'agit par exemple du comportement de l'iode sous irradiation dans l'enceinte de confinement et de celui du ruthénium dans le circuit primaire du réacteur. Le programme expérimental STEM vise à réduire ces incertitudes avec deux objectifs principaux :
  • permettre le développement de meilleurs outils de simulation numérique et d'accroitre le niveau des connaissances, afin d'aider in fine les équipes devant gérer une situation d'accident nucléaire à établir un diagnostic et un pronostic plus robustes sur la progression de l'accident ;
  • identifier des mesures complémentaires qui pourraient être prises afin de réduire davantage, par rapport à l'existant, les rejets de produits radioactifs dans l'environnement (mitigation).
 

Déroulement et axes de recherche

La première phase du programme s'est déroulée de mi-2011 à mi-2015 et comprenait trois thèmes d'études.

Les rejets radioactifs à moyen et long termes 

Les travaux de recherche sur le terme source réalisés au cours des années 2000 ont porté essentiellement sur l'évaluation des rejets radioactifs potentiels dans l'environnement à court terme, c'est-à-dire durant les tous premiers jours d'un accident de fusion du cœur du réacteur, lorsque les rejets seront probablement les plus importants. Il restait à étudier la quantification et la compréhension d'un relâchement différé et continu pendant une relative longue période (plusieurs jours, voire semaines après le début de l'accident, d'où l'introduction de "moyen, voire long termes" dans le programme STEM.

Être capable d'évaluer l'évolution des rejets en iode gazeux (sous formes d'iode moléculaire I2 et d'iode organique RI) à l'échelle de la semaine est jugé important pour la gestion des accidents car cela conditionne notamment la durée pendant laquelle des mesures d'urgence telles que l'évacuation ou la mise à l'abri de la population devront être maintenues dans un périmètre donné. Les récentes avancées de la R&D dans le domaine ont permis de confirmer certaines hypothèses formulées concernant de potentiels nouveaux phénomènes qui pourraient significativement modifier ce "terme-source moyen terme". En effet, à titre d'exemple, on peut citer que les particules d'aérosols d'iode déposées sur les parois internes de l'enceinte de confinement ou piégées dans des dispositifs de filtration pourraient ne pas être stables sous rayonnements ionisants, se modifiant alors en espèces volatiles. L'un des buts des expérimentations qui ont été menées dans le cadre du programme STEM était donc d'acquérir des données permettant de déterminer les lois cinétiques de décomposition des différentes espèces d'iode sous forme d'aérosols.

Au-delà de l'acquisition de données expérimentales sur le moyen terme, le programme STEM avait également pour but d'étendre le domaine de validation des modèles présents dans le logiciel de calcul ASTEC et décrivant le comportement de l'iode gazeux dans l'enceinte de confinement pour des durées plus longues que la référence classique des 24h, caractéristiques des rejets dits "court terme".

La chimie du ruthénium dans le circuit primaire

Pour certains scénarios d'accident, de l'air peut entrer en contact avec le combustible accidenté et endommagé et des quantités de ruthénium gazeux (RuO4) peuvent alors être relâchées.

Si des données relativement riches existent pour ce qui concerne le comportement du RuO4 dans l'enceinte de confinement, les données relatives au comportement du RuO4 lors de son transport dans les circuits d'un réacteur - depuis le combustible jusqu'à l'enceinte de confinement - sont quant à elles peu nombreuses. Il est apparu nécessaire de réaliser dans le cadre du programme STEM des essais recouvrant les différentes situations accidentelles pouvant survenir.

Cette "problématique Ruthénium", historiquement liée aux enjeux de sureté d'un REP en conditions accidentelles (typiquement accident de perte de réfrigérant primaire en réacteur suivi d'une entrée d'un mélange gazeux oxydant provenant de l'atmosphère de l'enceinte lors de la rupture de la cuve), peut également revêtir une grande importance lors d'autres type de situations accidentelles comme par exemple : les accidents de dénoyage de la piscine d'entreposage de combustibles usés ou encore ceux relatifs à la manutention de combustibles . Ces différents cas de figures mettent notamment en jeu des champs de température et une trempe chimique du Ru04 différents et c'est dans cette logique que ces divers paramètres ont été également étudiés dans le cadre du programme STEM.

Les expériences analytiques et paramétriques du volet « ruthénium » du programme STEM ont pu fournir suffisamment de données pour le développement de nouveaux modèles qui seront implantés dans le logiciel de calcul ASTEC.
 
L'impact du vieillissement des peintures sur leurs interactions avec l'iode 

Le rôle crucial des matériaux organiques, en particulier des peintures, sur le comportement de l'iode dans l'enceinte de confinement est bien reconnu. Dans le cadre du programme STEM, l'étape suivante consistant à mener une bibliographie sur les interactions de la peinture avec l'iode a été franchie, permettant d'identifier les lacunes de connaissances et un ensemble d'expériences à réaliser, prioritairement sur l'étude des phénomènes d'adsorption, de désorption d'iode et de production d'iode organique volatil prenant en compte le vieillissement des peintures.
 

Principaux résultats

Les résultats présentés ici sont relatifs à des essais menés sur la plateforme expérimentale de chimie et radiochimie CHROMIA et plus précisément dans l'installation EPICUR-LEAR et sur le banc START.

Les rejets d'iode à moyen et "long" termes
 
Sur l'ensemble du volet IODE de la 1ère phase du projet STEM, 19 essais mettant en jeu de l'iode 131 ont été réalisés, couvrant 2 thématiques :
  • Des essais d'irradiation couvrant la phase « moyen terme » (30 à 100 h) sur des coupons d'acier peints avec des dépôts d'iode moléculaire (I2) ont été réalisés dans le but d'évaluer la cinétique de relâchement d'iode gazeux (I2 et CH3I) depuis ces peintures. Les différentes cinétiques au cours du temps ont pu être quantifiées, ce qui a permis in fine d'estimer avec un niveau de confiance satisfaisant, le taux de conversion à moyen terme d'I2 moléculaire en iode organique.
  • Des essais relatifs à la stabilité des aérosols d'iodure de césium et cadmium sous irradiation ont également été réalisés sur des durées couvrant la phase « moyen terme ». Ils ont révélé la production d'iode moléculaire gazeux (I2). Ce phénomène, pressenti mais jamais mis en évidence auparavant, peut avoir une influence significative sur la concentration stationnaire en iode gazeux dans l'enceinte de confinement, donc in fine sur le terme source en iode, dans la mesure où il s'agit d'un terme additionnel concernant les rejets différés. Autrement dit, en cas de procédure tardive d'éventage-filtration de l'enceinte de confinement, la quantité d'iode susceptible d'être relâchée dans l'environnement pourrait être significativement augmentée.
 
Sur la base de ces observations expérimentales, la modélisation des phénomènes-clés qui pilotent le comportement de l'iode dans le bâtiment réacteur ont été intégrés dans le logiciel de simulation ASTEC :

  • Interaction des espèces I2 et CH3I avec les peintures sous irradiation ;
  • Formation et décomposition radiolytique (i.e. sous l'effet des rayonnements ionisants) des aérosols d'iode et des oxydes d'iode sous rayonnement ;
  • Conversion radiolytique I2 - CH3I.


Ces nouveaux développements seront utilisés dans des calculs d'application au cas réacteur afin de pouvoir quantifier plus précisément l'impact sur le terme source.

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Installation Epicur utilisée pour les essais sur l'iode © IRSN

La chimie du ruthénium dans le circuit primaire 

Après avoir qualifié les dispositifs expérimentaux (qualification du réacteur d'essai, des dispositifs de prélèvement et de mesure associés) et les systèmes permettant de reproduire les gradients thermiques à étudier qui représentent au mieux les différentes conditions accidentelles, plus d'une vingtaine d'essais ont été réalisés sur le banc START.

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Installation Start © IRSN

Les principaux paramètres d'intérêt suivants ont été mis en œuvre :
          1. Les cinétiques de transfert du ruthénium dans le tube à gradient thermique (TGT) représentatif d'un circuit primaire de REP  (incluant des essais reproduisant le transport direct : essais représentatifs de la vaporisation depuis le cœur et des essais dits de revaporisation de Ru depuis des dépôts présents dans le circuit, « transport indirect ») ;
          2. Le gradient thermique appliqué dans le TGT ;
          3. La nature du matériau du TGT (quartz vs acier inoxydable).

    Les principales conclusions peuvent être résumées ainsi :
  • Au terme des différentes phases de vaporisation et de revaporisation des dépôts dans le circuit, un relâchement de plusieurs pourcents de ruthénium gazeux à la sortie du circuit (dans les conditions testées) est observé ;
  • Lors des essais de revaporisation, le ruthénium transporté est quasi-exclusivement sous forme gazeuse ;
  • L'importance du processus de revaporisation est identique, quel que soit le matériau du TGT (acier inoxydable ou quartz) ce qui confirme l'approche expérimentale poursuivie (nombreux essais mettant en œuvre un circuit en quartz, matériau plus facile à exploiter lors des examens post-essais, pour mener un plus grand nombre d'essais à caractère  plus analytique et utilisation de l'acier inoxydable (représentatif des circuits primaires de REP mais dont l'exploitation post-essais est lourde) uniquement pour s'assurer de la représentativité).

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Schéma de principe de l'installation Start © IRSN

Perspectives
 
Si les résultats expérimentaux du programme STEM permettront la poursuite de la validation des modèles implémentés dans l'outil de simulation ASTEC, une extension du programme expérimental à partir janvier 2016 est nécessaire pour étudier des conditions d'essais encore plus représentatives des conditions réelles d'un accident avec fusion de combustible. Les deux volets historiques, l'un dédié à la chimie de l'iode dans l'enceinte et l'autre à celle du ruthénium dans le circuit primaire, seront à nouveau présents. Les différents thèmes d'études seront :
 

  1. Comportement de l'iode sous rayonnement
  • Impact sous irradiation du vieillissement des peintures
  • Décomposition radiolytique des oxydes d'iode
  • Décomposition des oxydes d'iode par le CO et/ou H2
  • Oxydation radiolytique des aérosols d'iode multi-composants
     
  1. Chimie du ruthénium avec focus sur les phénomènes de revaporisation :
  • Effet de la surface de dépôts et de son état de surface
  • Effet de l'application de conditions super-oxydantes
  • Effet de la présence de « polluants gazeux »
  • Effet de la spéciation du ruthénium pénétrant le circuit primaire


1. On désigne par "terme source" l'ensemble des informations qui caractérisent les rejets de produits radioactifs dans l'environnement : les espèces chimiques rejetées, les isotopes concernés, les formes physico-chimiques (gaz, aérosols), la quantité rejetée pour les différentes espèces et la cinétique des rejets.

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Caractéristiques
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​Dates : 2011-2015 (phase 1), 2016-2019 (phase 2)

Partenaires : NRC (États-Unis), CNL (Canada), VTT (Finlande), UJV (République Tchèque), KINS et KAERI (Corée du Sud), GRS (Allemagne), EDF et IRSN (France)

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Laboratoire IRSN impliqué
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