Le projet Epic : une plateforme expérimentale à Tchernobyl

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26/01/2010
Dernière mise à jour en avril 2021

Epic (Experimental Platform in Chernobyl) est un outil pour l’étude du transport des radionucléides dans les sols et les aquifères.

Le projet et les partenaires

 
En collaboration avec l'Institut ukrainien de radioécologie (UIAR) et l'Institut des géosciences (IGS), l'IRSN a équipé et entretenu entre 1999 et 2015 un site expérimental situé dans la zone d’exclusion de la centrale nucléaire de Tchernobyl, à 2,5 kilomètres à l'ouest du réacteur n° 4 qui a explosé en 1986. L'objectif des recherches menées sur cette plate-forme est de développer des modèles permettant de prédire la migration des radionucléides depuis une source de contamination jusqu'à l’homme. Les instituts ukrainiens utilisent le site et les modèles numériques élaborés dans le cadre de ce projet pour des évaluations des risques générés par les dépôts de déchets dans la zone contaminée de Tchernobyl.

La plateforme expérimentale offre la rare opportunité d’étudier, en vraie grandeur, le transport des radionucléides d’une tranchée de déchets vers un système complexe sol-aquifère. L'IRSN peut ainsi acquérir un savoir-faire important dans la gestion des sites pollués (nucléaires ou autres) et valider les résultats obtenus par modélisation à partir d’expériences en laboratoire en les comparant à ceux obtenus sur le terrain.

 

 

Le site : implantation et instrumentation

 

Le site expérimental est une zone rectangulaire de 100 m x 80 m organisée autour d’une tranchée peu profonde où des déchets radioactifs fortement contaminés par des particules de combustible ont été enterrés après l’accident de la centrale.

Trois zones d'intérêt dans ce site :

  • La zone de surface, non saturée (ZNS), est un sable éolien constitué de quartz pratiquement pur. La zone non saturée est équipée de trois dispositifs, chacun d’eux étant composé d’un ensemble de capteurs dédiés au suivi de la pression de succion, de l’humidité et de la température à différentes profondeurs. L'un de ces dispositifs enregistre les variations de ces paramètres dans la tranchée, les deux autres permettent les mêmes acquisitions en deux points du milieu naturel. La composition chimique et radiologique de l’eau de la ZNS est régulièrement mesurée grâce à des prélèvements réalisés à l’aide de bougies poreuses. Une station météorologique mesure la pluviométrie, la vitesse et la direction du vent, les heures d’ensoleillement, la température, l’humidité et la température de la partie supérieure du sol.
  • La tranchée de déchets, d'une profondeur de 2,5 m, est entièrement située dans la zone non saturée et a également été instrumentée. Ces déchets sont composés pour majorité de sable et pour une plus faible part de matière organique en cours de décomposition et contiennent les particules de combustible dispersées sur le sol suite à l’explosion du réacteur.
  • L’aquifère est composé à la fois de sable éolien et de dépôts alluviaux. Les dépôts alluviaux sont plus argileux, donc moins perméables. Dans l’aquifère, les piézomètres permettent d’observer les variations de pression et d’effectuer des prélèvements réguliers d’échantillons afin de suivre la composition de l’eau de la nappe.

 

 

Objectifs et méthodologie

 

Les recherches en cours portent sur le transport du strontium 90, du césium 137 et du plutonium dans la ZNS et l’aquifère. La tranchée, la zone non saturée et l’aquifère nécessitent des approches expérimentales spécifiques qui permettent de développer des modèles conceptuels adaptés.

 

Les principaux facteurs qui influent sur le transport des radionucléides sont : 

  • la vitesse de dissolution des particules de combustible nucléaire dans la tranchée, 
  • la diffusion et la dispersion des radionucléides dans la zone non saturée et dans la zone saturée, 
  • l’interaction des radionucléides avec le sol.

 

Les recherches sont menées sur le terrain et complétées par des expériences en laboratoire, permettant de valider les modèles mis au point. Une base de modélisation a ainsi déjà été constituée et validée pour le strontium 90, base à partir de laquelle la migration des radionucléides peut être étudiée sur de grandes échelles de temps (1000 ans) en intégrant les possibles modifications des conditions aux limites.

 

 

Le cas du transport du strontium 90


Le terme source

Le terme source est constitué de la tranchée de déchets. L’infiltration des eaux météoriques dans cette tranchée entraîne la mobilisation du strontium et sa migration vers la zone non saturée.


La zone non saturée (ZNS)

Le transport du strontium dans la ZNS dépend de la teneur en eau ou de la pression de succion, ainsi que de l’hétérogénéité géologique comme le montre la répartition hétérogène du strontium dans le sable. Pour étudier ces caractéristiques de la ZNS, des colonnes-tests contenant du sable éolien ont été installées en laboratoire pour y suivre le déplacement de l’eau ou d’un traceur en temps réel.

Ces expérimentations en colonne permettent d’établir les relations de la pression de succion et de la conductivité hydraulique en fonction de la teneur en eau, paramètres hydrodynamiques de la colonne. Ce dispositif permet également de suivre en temps réel les écoulements de l’eau et la migration de polluants, servant de base aux modélisations du transport en zone non saturée. L’interaction d’un l’élément avec la matrice sable/limons, facteur important du transport, est quantifiée par un coefficient de partage noté Kd (ml/g).

Le transport dans l’aquifère

La distribution granulométrique du sol montre que les sables alluviaux contiennent davantage de limons et d’argile, et confirme la différence de comportement hydraulique entre les sables éolien et alluvial. La capacité d’échange cationique (CEC) du sol est plus élevée dans un environnement alluvial en raison d’une teneur plus importante en argile. Ce qui conduit à un coefficient de partage du strontium 90 plus élevé.

L'enregistrement en continu de la pression à partir des différents piézomètres installés sur le site et en dehors de son emprise fournit le sens et le gradient d’écoulement de l’eau dans l’aquifère. Les variations de pression sont principalement liées aux épisodes pluvieux ou à la fonte des neiges.

Des campagnes régulières de prélèvements permettent de suivre les modifications de la qualité de l’eau de la nappe ainsi que la migration des radionucléides, en particulier du strontium 90.

L'ensemble de ces données a permis de modéliser l’évolution du panache en strontium 90 de la tranchée à la zone non saturée et à l'aquifère. 

 

 

Recherches futures

 

Les recherches à venir dans les prochaines années auront pour objectifs :

  • d’étudier l’influence des variations hydraulique et chimique du transitoire d’écoulement, 
  • de comprendre la phénoménologie du transport dans la zone non saturée, 
  • d’étudier l’influence du contenu de la tranchée sur la chimie de l’aquifère, 
  • d’identifier le transport éventuel de certains éléments transuraniens.
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Laboratoire IRSN impliqué
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