Contamination chronique par uranium: effet sur le métabolisme des xénobiotiques et exemple du paracétamol

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05/06/2007

Titre du congrès :ARET 2007 Ville du congrès :Maisons Alfort Date du congrès :04/06/2007

Type de document > *Congrès/colloque
Mots clés publication scientifique > contamination chronique , cytochrome P 450 , médicaments , paracétamol , uranium
Unité de recherche > IRSN/DRPH/SRBE/LRTOX
Auteurs > BAUDELIN Cédric , GOURMELON Patrick , GRANDCOLAS Line , GRISON Stéphane , GUEGUEN Yann , SOUIDI Maâmar

  L'uranium est un métal lourd naturellement présent dans la croûte terrestre. Son utilisation à des fins civiles (cycle électronucléaire, engrais phosphatés, charbon...) conduit à l'augmentation des sources d'exposition et ainsi du risque d'exposition à ce radioélément. La contamination de la population par l'uranium peut donc avoir lieu par ingestion du fait de la contamination de l'eau de boisson ou au transfert de l'uranium à travers la chaîne alimentaire. Les effets sur la santé d'une contamination chronique par une faible dose d'uranium sont peu connus. L'un de nos objectifs est d'étudier un système majeur de défense de l'organisme : le métabolisme des xénobiotiques. A titre de comparaison, les métaux lourds modifient l'expression des enzymes du métabolisme des xénobiotiques (Moore, 2004). L'uranium, pourrait se comporter comme d'autres métaux lourds en plus des effets liés à sa faible activité radioactive.
 
L'organisme humain est quotidiennement exposé à des composés potentiellement toxiques (Commandeur and Vermeulen, 1990) mais est capable de métaboliser activement de nombreux médicaments, polluants chimiques et autres xénobiotiques. Les enzymes du métabolisme des médicaments (ou xénobiotiques), dont les cytochromes P450 (CYP), jouent un rôle central dans la biotransformation, le métabolisme et/ou la détoxication de composés étrangers à l'organisme (Gueguen et al., 2006a). Le métabolisme des xénobiotiques est composé de 3 phases qui permettent l'élimination des substances étrangères dans la bile et l'urine. Ce système de détoxication est également impliqué dans la dégradation de substances endogènes : l'élimination d'hormones stéroïdiennes (testostérone), thyroïdiennes et d'acides biliaires. Un traitement médicamenteux peut donc interférer avec l'homéostasie de substances endogènes en modifiant leur métabolisme. Nous avons entrepris de caractériser les réponses de ce système de défense de l'organisme car son altération peut avoir des conséquences physiopathologiques importantes.
 
Quelques rares études ont examiné les effets de l'uranium appauvri (UA) sur les cytochromes P450 et concernent principalement une administration d'une dose élevée et néphrotoxique d'UA (5-10 mg/kg). Dans ces conditions l'expression et l'activité des différentes isoformes de CYP sont modifiées (Gueguen et al., 2006b) et la pharmacocinétique de plusieurs médicaments est affectée (Moon et al., 2003). Par contre, les effets d'une contamination chronique par une dose non néphrotoxique d'UA (40mg/l soit 1mg/rat/jour) sur les CYP et le métabolisme des médicaments n'avaient pas encore été décrits.
 
L'administration chronique d'une faible dose d'uranium appauvri n'induit pas d'effet toxique visible (poids corporel, marqueurs plasmatiques du foie et du rein). Nous avons montré précédemment qu'après une contamination chronique de 9 mois par de l'UA (40 mg/l), l'expression de certaines enzymes de la phase I (CYP3A) est augmentée dans différents tissus (foie, rein, cerveau, poumon) alors que l'expression des enzymes de la phase II (GST, UGT) et des transporteurs de la phase III (MDR1, MRP2) ne varie pas (Fig 1) (Gueguen et al., 2005; Souidi et al., 2005). En conséquence, nous avons émis l'hypothèse que la pharmacocinétique –donc la biodisponibilité- des médicaments pourrait être modifiée et conduire à une toxicité médicamenteuse ou une inefficacité thérapeutique lors d'un traitement médicamenteux.
 
Figure 1 : Effet d'une contamination chronique par l'UA sur le métabolisme des xénobiotiques
 
Nous avons testé cette hypothèse avec un traitement par le paracetamol (fig 2) (Gueguen et al., 2007), un médicament potentiellement hépatotoxique et nous avons observé que les animaux contaminés par l'UA éliminaient moins rapidement le paracétamol plasmatique : après 24 h de traitement la concentration de paracétamol est augmentée de 56% (p<0,05) dans le groupe contaminé par l'UA par rapport au groupe non contaminé.  De plus, l'administration de paracétamol aux rats contaminés par l'UA augmente les transaminases plasmatiques (AST, ALT) plus rapidement que pour les animaux non contaminés. Des altérations histologiques rénales (nécrose incomplète des tubules contournés proximaux) sont observées plus fréquemment dans le groupe contaminé par l'UA. L'expression génique des principales enzymes du métabolisme du xénobiotiques (phase I, II et III) a été mesurée dans le foie et le rein de ces animaux. Une augmentation de 3 fois de l'expression de CYP2E1 (p<0.01), un P450 important impliqué dans la bioactivation du paracétamol et la production de métabolite toxique a notamment été observée dans le rein 24h après traitement par le paracétamol. Dans le foie, les activités des CYPs sont diminuées pour les animaux contaminés par rapport aux animaux témoins.
 
Figure 2 : Effet d'un traitement par le paracétamol (APAP, 400 mg/kg) après contamination chronique par l'uranium appauvri (UA, 40mg/l) sur le taux plasmatique de paracétamol, les transaminases plasmatique, l'histologie rénale et l'expression génique de CYP2E1
 
Cette étude montre qu'une contamination chronique par l'uranium pendant 9 mois perturbe le métabolisme des médicaments et potentialise ainsi la toxicité du paracétamol. Les effets d'un traitement par une dose thérapeutique de paracétamol sont en cours d'analyse afin de les comparer à la dose légèrement hépatotoxique précédemment utilisée.

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