Savoir et comprendre

Qu'est-ce que le démantèlement des installations nucléaires ?

24/01/2018

​Le démantèlement regroupe les opérations visant à évacuer les matières et déchets radioactifs, à retirer les matériels présents, à assainir et à démonter les bâtiments d’une installation nucléaire en fin de vie ou à l’arrêt définitif. C’est un projet industriel de très longue durée avec un examen de sûreté à chaque étape afin d’assurer la maîtrise des risques des opérations.

 

Entreposage du couvercle de la cuve du réacteur EDF de Chooz A (Ardennes) en attente d’évacuation  
Entreposage du couvercle de la cuve du réacteur EDF de Chooz A (Ardennes) en attente d’évacuation (© Dureuil/IRSN)

L​'arrêt définitif et le démantèlement d’une installation nucléaire visent à atteindre trois objectifs :

 

  • évacuer les substances dangereuses et les déchets encore présents dans l'installation à la fin de la phase de fonctionnement ;
  • décontaminer, puis démonter les équipements de procédé d’exploitation ;
  • assainir les locaux ayant contenu des zones à production possible de déchets nucléaires, et assainir les sols puis, si nécessaire, déconstruire les bâtiments de l'installation.

 

A l’issue du démantèlement, le déclassement de l’installation est prononcé par l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN) qui peut l’assortir de restrictions d’usage en fonction de l’impact résiduel.

 

Des opérations nombreuses et très contrôlées
 

Le démantèlement d’une installation nucléaire doit être conduit avec une organisation adaptée, différente du fonctionnement. La maîtrise des procédés doit faire place à la maîtrise d’un projet où les opérations réalisées présentent des spécificités nouvelles, dans un environnement en permanente évolution.

Opération de découpe d’une plaque d’acier en casemate  
Opération de découpe d’une plaque d’acier en casemate (bunker) sur le chantier de démantèlement de la centrale nucléaire de Greifswald (Allemagne) (© Dureuil/IRSN)

Cette phase de la vie de l'installation recouvre des opérations très variées, de natures différentes et pouvant se dérouler concomitamment dans de nombreuses parties de l'installation.

Par exemple, des opérations de reprise de déchets peuvent se dérouler dans une zone, alors que des actions d'assainissement d'équipements sont en cours dans une autre, que des déconstructions de bâtiments annexes se préparent et que des unités de traitement de matériels ou de déchets sont exploitées dans un atelier aménagé à cet effet.

Le démantèlement est donc un projet industriel à part entière, géré avec un examen de sûreté pour chaque étape afin d’assurer la maîtrise des risques des opérations.


Deux données sont essentielles pour la définition du projet :

  • l'état initial de l'installation, notamment une connaissance suffisamment précise de la radioactivité résiduelle dans les locaux et dans les équipements de procédé, des particularités de conception de l'installation et de ses matériels, des procédés, de l'historique d'exploitation tels que les incidents ayant entraîné des contaminations localisées dans des zones non accessibles et enfin, de l'état des équipements qui pourraient servir lors du démantèlement (systèmes de manutention par exemple) ;

     
  • l'état final visé, à savoir la réutilisation ou non des bâtiments, la déconstruction totale avec déclassement de l'installation, la dépollution éventuelle des sols, les restrictions d’usage futur ou non.

 

Piscine du réacteur de Chooz A (Ardennes) utilisée pour le démantèlement de la cuve et des internes  
Piscine du réacteur de Chooz A (Ardennes) utilisée pour le démantèlement de la cuve et des internes (© Dureuil/IRSN)

Par ailleurs, la préparation des opérations, l'appel à des entreprises spécialisées et expérimentées, la formation du personnel et la réalisation préalable d'études de sûreté sont nécessaires au bon déroulement d'un projet de démantèlement. Dans ce cadre, les risques liés aux facteurs humains et à l'organisation des opérations concernées revêtent une importance toute particulière.
 

Enfin, deux facteurs peuvent rentrer en ligne de compte : une connaissance imparfaite de l'installation (absence de plans de réalisation initiaux par exemple) ou de son historique (incidents et modifications dont les traces ont pu être perdues). Ainsi, des vérifications sont à prévoir en préalable à la réalisation des phases de travaux à risques particuliers, en particulier la réalisation d’états radiologique et chimique.

 

Un décret d’autorisation et un référentiel de sûreté
 

Durant un démantèlement, le contexte opérationnel va évoluer au fil des opérations d'assainissement et de démontage réalisées. Par exemple, les dispositions relatives aux risques de criticité seront supprimées lorsque l'absence de matière fissile en quantité susceptible d'induire un tel risque aura été vérifiée.
 

Visite technique dans le cadre de l'instruction de l'étape 1 de démantèlement de l’installation nucléaire Chinon A3 (Indre-et-Loire)  
Visite technique dans le cadre de l'instruction de l'étape 1 de démantèlement de l’installation nucléaire Chinon A3 (Indre-et-Loire) (© Laurent Zylberman/Graphix-Images/IRSN)

Le référentiel de sûreté de l'installation doit ainsi être adapté pour tenir compte de la persistance ou non des risques et de la nécessité de maintenir ou de faire évoluer les dispo​sitions de maîtrise associées. Dans ce contexte, l’exploitant doit produire un référentiel de sûreté suffisamment consistant pour permettre la délivrance du décret prescrivant l’ensemble du démantèlement jusqu’à atteinte de l’état final.
 

Le démantèlement peut néanmoins s'étaler sur de très nombreuses années et certaines opérations, en particulier les plus lointaines, sont parfois difficiles à définir en totalité. Un jalonnement du projet en grandes étapes regroupant un ensemble d'opérations cohérentes et homogènes peut alors constituer une solution facilitant à la fois la réalisation et l’encadrement réglementaire du démantèlement.
 

Le référentiel de sûreté justifiera le jalonnement retenu, les risques aux différentes étapes, leurs conditions de maîtrise, et les conditions de passage d'une étape à une autre. L’échéancier des opérations pourra prévoir des examens de sûreté particuliers - appelés « points d’arrêt » - afin de confirmer les dispositions de sûreté initialement prévues, voire de les améliorer en tenant compte des meilleures techniques disponibles.