Savoir et comprendre

Avancées marquantes en matière de sûreté

02/03/2013

Les travaux réalisés dans le domaine des accidents de fusion de cœur

Les travaux réalisés dans le domaine des accidents de fusion de cœur ont conduit à améliorer les lignes de défense des installations pour améliorer la gestion de ce type d’accident et diminuer les rejets associés.


Les modifications les plus importantes réalisées sur les réacteurs en exploitation ont concerné : l’ajout d’un filtre à sable (procédure U5) permettant de réaliser des rejets contrôlés et différés au cours d’un accident grave, la mise en place de recombineurs catalytiques passifs d’hydrogène à l’intérieur des enceintes de confinement afin de limiter les risques d’explosion de l’hydrogène produit par l’oxydation des gaines du combustible et par l’interaction corium-béton, la fiabilisation des soupapes de décharge du pressuriseur afin d’assurer la dépressurisation du circuit primaire en cas de fusion du cœur.

 

Grace aux outils de simulation numérique qu’il a développé, l’IRSN a pu étudier un large spectre de scénarios accidentels envisageables et en effectuer un remontage au sein d’études probabilistes de sûreté de niveau 2 (EPS2 : études probabilistes relatives aux rejets radioactifs en situation d’accidents graves) afin de hiérarchiser les risques encourus (fréquence annuelle des accidents considérés, gravité des conséquences).
 

Le troisième réexamen décennal des réacteurs de 900 MWe a vu la première application en France de ces EPS2, ce qui a facilité l’identification de plusieurs renforcements des installations vis-à-vis des accidents graves, par exemple :
 

  • le renforcement de la boulonnerie du Tampon d’Accès Matériel (TAM) de l’enceinte de confinement permettant d’en garantir la tenue à une pression très supérieure à la pression de dimensionnement
     
  •  la fiabilisation du maintien en position ouverte des soupapes de décharge du pressuriseur dans les conditions dégradées (température et irradiation) d’un accident grave
     
  • la mise en place d’une instrumentation visant à détecter la présence d’hydrogène dans l’enceinte de confinement et l’éventuelle défaillance de la cuve afin d’aider le diagnostic et le pronostic des équipes de crise en situation d’accident grave.
     

Toutes ces évolutions seront mises en œuvre par l’exploitant lors du prochain arrêt décennal. Pourtant, à l’issue de ce réexamen, des sujets à fort enjeu du point de vue de la gestion d’un éventuel accident de fusion du cœur restent à traiter ou à approfondir, par exemple :
 

  • l’optimisation de la stratégie de gestion des appoints en eau en et hors cuve, de l’aspersion dans l’enceinte de confinement de manière à minimiser tout risque de défaillance de l’enceinte de confinement suite à un phénomène énergétique (explosion de vapeur et combustion d’hydrogène) sans remettre en cause le refroidissement et la stabilisation du combustible dégradé
     
  • la spécification d’une gestion pour la phase de gestion à long terme d’un accident
     
  • la recherche de dispositions complémentaires sur certaines situations d’accident pouvant conduire à des rejets importants : accident de réactivité (dilution hétérogène), de fusion en pression, de bipasse du confinement (rupture de tube d’un générateur de vapeur ou défaut d’isolement de l’enceinte notamment dans les états d’arrêt du réacteur si une grande traversée est ouverte)
     
  • la recherche de solutions permettant d’éviter quasiment en toutes circonstances les conséquences sur l’environnement d’un percement du radier (pollution des sols et nappes phréatiques en particulier)
     
  • la limitation des rejets en iode gazeux, potentiellement élevés, en cas d’ouverture du dispositif d’éventage-filtration (U5) des enceintes de confinement
     
  • l’amélioration de la robustesse de la fonction d’isolement de l’enceinte en cas de perte des sources électriques
     
  • une meilleure compréhension du comportement des enceintes double de confinement en situation de fusion du cœur pour les réacteurs de 1300 et 1450 MWe.

 

Par ailleurs, pour l’IRSN, les attendus en lien avec l’extension de la durée de fonctionnement des réacteurs (de 40 à 60 ans selon la proposition d’EDF) concernent l’élimination de situations conduisant à des rejets massifs ou précoces et, de manière générale, la diminution des rejets induits par toutes les situations accidentelles envisageables. Cela contribuera à rapprocher les niveaux de sûreté des réacteurs de 2ème et de 3ème génération.
 

Un point clef réside dans la compréhension actuelle de la phénoménologie d’un accident, qui a été obtenue par les programmes de R&D (auxquels l’IRSN a très largement contribué), afin de permettre d’élaborer et de valider des solutions techniques opérationnelles. Dans ce cadre doivent être examinées des dispositions complémentaires permettant d’éviter le percement du radier dans la plupart des cas, ou d’améliorer l’efficacité de la filtration du dispositif d’éventage des enceintes de confinement (U5).
 

L’accident de Fukushima conforte cette démarche française d’amélioration du niveau de sûreté des anciens réacteurs contrairement à d’autres pays qui, avant cet accident, abordaient l’extension de la durée de fonctionnement des réacteurs avec un objectif principal de maintien du niveau de sûreté actuel.