Pour la sûreté des réacteurs
nucléaires en cas d’accident grave, l’un des problèmes à fort enjeu est la
rétention du combustible nucléaire fondu, appelé corium, à l’intérieur de la
cuve du réacteur (RPV). Une des façons de refroidir le corium dans le RPV est
de refroidir la cuve par l’extérieur. Cette stratégie est appelée rétention du
corium en cuve (IVR). En cas de stratégie IVR, on s’attend à ce que le
bain de corium soit entouré d’une croûte oxyde qui sera en contact avec de
l’acier fondu à la surface supérieure du bain et le long de la cuve. Il a été
observé dans les essais CORDEB (financés par IRSN, CEA, EDF et AREVA), que
cette croûte devient perméable, ce qui a un impact sur l’épaisseur de la couche
d’acier fondu située au-dessus. Pour la stratégie IVR, une fine couche de métal
au-dessus de la croûte peut conduire à un flux de chaleur excessif vers la
paroi de cuve, conduisant à une rupture éventuelle de la cuve. Ce phénomène est
communément appelé focusing effect.
Ce travail traite de l’étude de la
dissolution d’une telle croûte afin d’estimer le temps pour que l’acier
s’écoule à travers elle. D’un point de vue thermochimique, le corium est un
mélange d’UO2, ZrO2 et Zr. Les interactions chimiques dans le système
quaternaire composé de U, Zr, Fe et O jouent un rôle important dans la
stabilité (ou non) de la croûte. Une étude thermochimique faite dans le cadre
de cette thèse montre ce système quaternaire peut être réduit à deux systèmes
ternaires dans chaque phase : (U, Zr) + O dans la phase oxyde et (U, Zr) + Fe
dans la phase métal, où les atomes Fe et O restent respectivement dans les
phases métal et oxyde, et les atomes (U, Zr) sont transférés entre les phases,
avec une proportion U/Zr approximativement constante. De plus, il a été montré
dans le présent travail que, dans ces systèmes ternaires dans chaque phase, les
interactions chimiques entre la croûte et le liquide peuvent être modélisées
comme la dissolution d’une zone poreuse diphasique binaire par un liquide. Par
conséquent, un modèle macroscopique a été développé par prise de moyenne
volumique des équations de transport –masse, espèces, quantité de mouvement,
énergie -, sur un volume élémentaire représentatif (VER).
Le système final
d’équations différentielles a été fermé en déterminant plusieurs relations
empiriques pour la diffusivité effective des espèces, les coefficients de
transfert de masse, la perméabilité et la conductivité effective. D’abord, le
modèle a été résolu numériquement pour étudier la progression de la dissolution
dans un domaine 2D diphasique sans convection dans la phase métal (vm = 0) avec
plusieurs relations de fermeture pour les coefficients de transfert de masse.
Cette étude a été faite pour déterminer la relation de fermeture la plus
pertinente permettant de décrire la dissolution de la croûte telle qu’observées
dans les essais CORDEB.
Cette étude de sensibilité a révélé que, pour retrouver
une microstructure similaire à celle observée sur les essais CORDEB, le temps
caractéristique de diffusion effective doit être beaucoup plus petit que le
temps de dissolution. Ensuite, le modèle a été résolu dans deux cas avec
convection dans la phase liquide. Dans le premier cas, l’écoulement liquide est
généré par un gradient de pression lorsque qu’une ouverture se forme dans la
croûte, à l’issue d’une phase de percolation due à la dissolution. Le second
cas est l’étude de la convection thermo-solutale se produisant à cause du
gradient de température imposé et des variations de composition résultant de la
dissolution. Les deux cas sont analyses par rapport à leurs conséquences en
situation d’IVR. Finalement, des conclusions générales ont été tirées vis-à-vis
des questions associées à la dissolution en cas d’IVR.