Les isotopes radiotoxiques de l'iode et du
ruthénium, tels que 129I, 131I, 103Ru et 106Ru, sont produits en
quantité significative durant la fission nucléaire. Après un accident de
réacteur nucléaire, ces éléments peuvent être rapidement disséminés
dans l’environnement, sous la forme d’espèces gazeuses très volatiles
comme l'iode moléculaire (I2) ou le tétraoxyde de ruthénium (RuO4). Afin
de limiter la dispersion de ces produits de fission en cas d’accident,
des filtres composés de matériaux poreux (zéolites ou charbon actifs)
peuvent être employés. Cependant, de tels solides poreux présentent des
limitations dans le contexte d'accident nucléaire. En effet, la présence
d'espèces empoisonnantes (par exemple NOx, H2O, COx) peut inhiber la
capture d’espèces radiotoxiques. De plus, leur relative faible porosité
n’est souvent pas adaptée au bon piégeage d’espèces volumineuses comme
RuO4. Sur la base de ces limites, une classe récente de matériaux poreux
appelés Metal-Organic Frameworks (MOFs) pourrait s’avérer être un
substitut efficace. En effet, les composés MOFs sont des matériaux
hybrides cristallisés, constitués de clusters inorganiques liés les uns
aux autres par des ligands organiques. Cette organisation peu dense
offre une porosité importante et des surfaces spécifiques élevées
(jusqu'à 7000 m2.g-1), nettement supérieurs à celles des solides poreux
habituels.
Afin de renforcer nos connaissances sur les composés
MOFs pour une potentielle utilisation en sureté nucléaire, ce travail
de thèse s’est intéressé à leur efficacité pour la capture de I2 et RuO4
volatils dans certaines matrices poreuses modèles (type UiO-66). Nous
avons mis en évidence l'importance de la fonctionnalisation du ligand
espaceur et du confinement de l’iode au sein du réseau poreux. Ainsi,
l’iode créé une interaction forte avec le ligand des MOFs pour former
d’autres espèces iodées de type Ix-. Cette transformation a notamment
été analysée par spectroscopie RAMAN.
Suite
à cette première étude, nous avons sélectionné le solide UiO-66_NH2
comme matériau de filtration de référence pour réaliser un essai dans
l’installation EPICUR de l’IRSN. Celle-ci permet l’étude du confinement
de l’iode radioactif (131I) au sein de la charpente poreuse en
conditions accidentelles (radiation, température, vapeur d’eau). Ce
travail a nécessité, en amont, d’élaborer un protocole de mise en forme,
afin de produire un matériau MOF avec une granulométrie sphérique
millimétrique. En parallèle, un travail sur la résistance de ce matériau
sous irradiation gamma a également été entrepris, dans l’installation
IRMA de l’IRSN. Cette étude a confirmé l’excellente efficacité du
UiO-66_NH2 dans le contexte choisi.
Enfin,
le matériau UiO-66_NH2 a également été le candidat choisi pour la
capture de RuO4 gazeux. Les différentes analyses (MET, RMN) ont permis
de quantifier le RuO4 au sein des pores et de proposer des mécanismes
réactionnels expliquant sa très bonne adsorption.