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Métrologie
- Radioprotection
Un
spectromètre pour mesurer les neutrons de haute énergie
Afin d'améliorer la radioprotection,
notamment dans les centres de protonthérapie, le Laboratoire de
métrologie et de dosimétrie des neutrons (LMDN) a développé un
nouveau spectromètre pour les neutrons de haute énergie.
Caractériser les neutrons de haute énergie constitue un enjeu
important pour affiner la protection des patients et des
manipulateurs contre ces rayonnements, par exemple dans les
installations de protonthérapie.
Un spectromètre a ainsi été
développé au LMDN dans le cadre d'une thèse, pour mesurer la
distribution des neutrons en fonction de leur énergie, sur une gamme
allant de quelques milliélectronvolts (meV) à une dizaine de
gigaélectronsvolts (GeV), et ce pour de faibles flux.
La
solution technique repose sur des détecteurs appelés sphères de
Bonner.
Leur principe est de ralentir les neutrons grâce à un
matériau modérateur, pour pouvoir ensuite les compter à l'aide d'un
détecteur, dont la sensibilité est maximale pour les neutrons lents,
placé au centre de chaque sphère1.
[ Sphères
conventionnelles...
]
Pour évaluer la sensibilité et les
performances de ce spectromètre, le parti a été pris de le modéliser
à l'aide du code Monte Carlo de simulation du transport des
rayonnements MCNPXGLO.
Celui-ci
permet de représenter les interactions des neutrons avec la matière
et donc les processus de ralentissement et de détection des
neutrons.
Dans un premier temps, un système conventionnel de
dix sphères de Bonner, capable de détecter des neutrons jusqu'à
quelques dizaines de MeV, a été modélisé.
Le code MCNPX a
permis d'étudier le comportement du système soumis à des flux de
neutrons.
Établies pour chaque sphère, les réponses en
fluence2 permettent alors de déduire le spectre des
neutrons par déconvolution des signaux fournis par le
système.
L'étude des variations de la réponse calculée en
fonction de l'incidence du flux de neutrons a montré que
l'agencement des sphères permet bien au système de mesurer le flux
de neutrons de manière isotrope avec une incertitude inférieure à
5 %.
[ ... et
modifiées ]
L'étape
suivante a consisté à étendre la sensibilité du spectromètre au-delà
de la dizaine de MeV, jusqu'à quelques GeV.
Pour détecter ces
neutrons d'énergie plus élevée, il faut parvenir à les ralentir
suffisamment.
L'idée a été de modifier des sphères en
ajoutant des métaux convertisseurs au sein du matériau modérateur,
pour démultiplier l'efficacité de détection.
La simulation
MCNPX a permis de valider l'ajout de trois sphères comportant du
plomb ou du tungstène.
Aujourd'hui réalisé, le spectromètre a
permis de caractériser le champ neutronique de la salle de
traitements ophtalmiques (73 MeV) du centre de protonthérapie de
l'Institut Curie d'Orsay (Icpo).
Il est par ailleurs
actuellement testé par le Laboratoire souterrain à bas bruit de
Rustrel (LSBB) du CNRS, et un autre exemplaire sera installé par
l'Onera au Pic du Midi, dans le cadre d'une thèse débutée en
2010.
Laboratoire souterrain à bas bruit de Rustrel
(CNRS/LSBB), Onera, Institut matériaux microélectronique
nanosciences de Provence (IM2NP) de l'Université Paul
Cézanne.
Contact : Véronique
Lacoste (Laboratoire de métrologie et de dosimétrie des
neutrons - LMDN)
1. Le matériau
modérateur utilisé ici est du polyéthylène de haute densité
massique. Le détecteur est un compteur proportionnel à
3He de haute pression gazeuse de remplissage. Le gaz
3He est utilisé car il possède une grande section
efficace de réaction pour les neutrons thermiques.
2. La réponse
en fluence correspond au nombre de coups de neutrons détectés par la
sphère, divisé par le flux de neutrons reçu par la sphère
(coups/(neutron/cm2)). Elle est fonction de l'énergie
incidente des neutrons.
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118
118 millions d'euros. C'est le budget
R&D de l'IRSN pour 2011.
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Advection
Flux d'eau résultant d'un gradient de charge
hydraulique.
Aquifère
Couche de terrain ou de roche, suffisamment poreuse (qui peut
stocker de l'eau) et perméable (où l'eau circule librement) pour
contenir une nappe d'eau souterraine.
Le
code MCNPX
Le code Monte-Carlo N-Particle eXtended est un code de
simulation numérique du transport de particules et d'interaction
avec la matière, qui utilise la méthode
Monte-Carlo.
Méthode
multicritère
Les méthodes d'aide multicritère à la décision sont des
méthodes mathématiques issues de la théorie de la décision et du
choix social.
La méthode utilisée dans Prime reprend les
concepts définis dans les méthodes Électre et
Prométhée.
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Publications
Émetteurs Auger et bêta
L'IRSN
vient de publier un rapport intitulé L'évaluation et la
gestion des risques associés aux expositions aux
radionucléides émetteurs Auger et bêta.
Rédigé en collaboration avec des experts du monde
associatif, de l'Inserm de Nantes, de l'Université Paris VI et
du CEA, ce rapport formule un avis sur la pertinence
du système de radioprotection pour la gestion et l'évaluation
prospective des risques en cas d'exposition à ces types de
radionucléides.
À partir de ce constat, des pistes de
recherche sont proposées pour améliorer le système de
radioprotection, pistes qui ont vocation à être examinées dans
le cadre du réseau d'excellence Melodi sur les faibles
doses.
La simulation numérique pour démontrer
la sûreté
Dans un ouvrage, paru début 2011,
sur les applications de la simulation numérique, l'IRSN fait
un panorama de son utilisation pour la démonstration de sûreté
dans les installations nucléaires. “Numerical Simulations -
Applications, Examples and Theory”, Intech, janvier
2011.
Nomination
Marc Benderitter, chef du Laboratoire de radiopathologie et
thérapie expérimentale de l'IRSN, est nommé président de
l'International Association of Radiopathology (IAR).
Conférence
Durant la conférence internationale “Twenty-five Years
after Chornobyl Accident. Safety for the Future”, qu'il a
contribué à organiser à Kiev du 20 au 22 avril 2011, l'IRSN a
prononcé une allocution sur “La sûreté nucléaire au
XXIe siècle” et fait des présentations techniques
sur la sûreté et la radioécologie.
Collaborations
Star, nouveau réseau d'excellence européen en
radioécologie
Le réseau d'excellence en radioécologie Strategy for Allied
Radioecology (Star), sous la coordination de l'IRSN, a été
lancé début février 2011, pour quatre ans et demi, dans le
cadre du 7ème programme cadre européen
Euratom.
Ce réseau a pour vocation d'intégrer la
recherche en radioécologie au niveau européen, en mutualisant
ressources humaines, financières et d'infrastructures autour
de neuf organismes en Europe. L'objectif premier de Star est
de construire un agenda stratégique de recherche sur 15
ans.
Environ deux tiers des activités de Star seront
consacrés à la recherche sur les thèmes prioritaires
suivants : l'intégration des méthodes d'évaluation des
risques radiologiques pour l'homme et les espèces
non-humaines, l'effet des faibles doses sur les écosystèmes et
enfin la prise en compte du contexte de multipollution dans
l'évaluation des risques.
Des actions de formation et
de diffusion large des connaissances et savoir-faire par des
outils originaux tels qu'un laboratoire virtuel et la création
d'observatoires en radioécologie, sont également
prévues.
Enfin, des liens seront établis avec d'autres
équipes de recherche internationales pour progresser plus vite
dans l'acquisition de connaissances.
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Gestion de
crise
Prime,
au service de la décision
Pour aider à prendre
des décisions en cas de contamination radioactive d'un territoire, le
projet Prime se fonde sur une analyse multicritère qui permet de classer
les communes selon leur vulnérabilité.
Les retombées radioactives d'un accident nucléaire peuvent toucher les
communes concernées de façon très variable, selon l'importance de la
contamination évidemment, mais aussi en fonction de son impact sur
l'activité humaine. Chaque commune peut ainsi subir des préjudices
d'amplitude et de nature variables sur des enjeux économiques
(entreprises, tourisme, foncier, emploi), environnementaux (contamination
de la ville, des cultures, de l'eau, etc.) ou sociaux. Or, une fois passée
la phase aiguë de l'accident, la gestion du territoire peut être facilitée
par un classement des communes en fonction de leur vulnérabilité à la
contamination. Cela suppose de définir un indice calculable pour chaque
commune et représentant l'ensemble de leurs préjudices. C'est l'objet du
projet Prime1, piloté par l'IRSN.
[ Développement d'une
méthode... ]
Pour étudier ce problème, les chercheurs de
l'Institut ont choisi d'exploiter le paradigme multicritère qui permet de
modéliser le schéma de pensée suivi par un acteur de la gestion de crise
pour juger des compromis acceptables entre les différents critères
considérés. Dans le cadre de Prime, les critères sont définis par les
enjeux des communes. Pour chaque enjeu, le préjudice subi est évalué sur
une échelle de 0 à 5. Cela crée une relation d'ordre et donc autant de
structures d'ordres que d'enjeux.
L'étape suivante consiste à
agréger ces structures d'ordre et à définir un indice de vulnérabilité
global pour chaque commune, afin de comparer les communes les unes aux
autres et de les classer. La solution choisie est une combinaison de deux
méthodes multicritèresGLO
d'aide à la décision. Intégrée dans le logiciel développé pour le projet,
cette combinaison revient à paramétrer numériquement les logiques et les
compromis réalisés par le raisonnement des acteurs du territoire, pour
hiérarchiser les communes et leur attribuer une valeur de
vulnérabilité.
[
... appliquée au terrain ]
Cette démarche a été appliquée au cas d'un
accident fictif survenant autour du site nucléaire de
Tricastin-Pierrelatte (Drôme et Vaucluse). Un groupe de travail a été
constitué avec des personnalités locales et des chercheurs pour identifier
les enjeux des communes. La définition des enjeux environnementaux a
nécessité des calculs d'impact détaillés par l'IRSN. Réalisé sur 18
communes, l'exercice de classement a été concluant.
La démarche
participative de Prime a permis de faire émerger un consensus sur la
caractérisation de la vulnérabilité du territoire. Le projet a aussi
montré qu'en modélisant les logiques opératoires des acteurs, une
hiérarchisation commune du territoire était possible malgré leurs
perceptions très différentes des enjeux. Ce résultat doit être confirmé
par d'autres applications, mais cette méthode apparaît déjà prometteuse,
tant par son contenu que par le processus d'interaction qui y
conduit.
ASN/Division de
Lyon, Préfecture
de la Drôme, Ineris, IRSN, Areva NC - site de
Pierrelatte, EDF, Écoles des Mines,
Université de
Paris-Dauphine/Lamsade, Université de
Grenoble/UMR Pacte, CLI du Gard, le
directeur du Pays “Une autre Provence”, le président du Conseil
scientifique du contrat de baie de la rade de Toulon, un exploitant
viticole local, un maire.
Contacts :
Vanessa Parache (Laboratoire d'études radioécologiques en milieux
continental et marin - LERCM)
Éric
Chojnacki (Laboratoire d'étude de l'incendie et de développement
de méthodes de simulation et d'incertitudes - Limsi)
1. Prime :
Projet de recherche sur les indicateurs de la sensibilité radioécologique
et les méthodes multicritères appliqués à l'environnement d'un site
industriel.
Evaluation
des risques
Éric
Chojnacki, acteur d'une recherche très transversale
Expert en analyse
statistique de l'incertitude et du risque à l'IRSN, Éric Chojnacki a conçu
Sunset, un logiciel qui reflète pleinement sa personnalité : ouvert
et (bientôt) libre.
Quelle est la “spécialité” d'Éric Chojnacki ? Jeter des ponts
entre les spécialités. Curieux de tout et de tous, il n'a de cesse de
traverser les disciplines, d'élargir son champ de compétences, quitte à se
hasarder en terre incertaine. Il estime en effet que pour faire avancer la
connaissance, la recherche a intérêt à se montrer plurielle, et
partageuse.
Revenons à nos ponts. Lorsqu'il commence sa carrière,
cet ingénieur des Ponts et Chaussées veut se consacrer à la R&D dans
une grande entreprise : après un bref passage chez EDF puis Areva, il
rejoint l'IRSN en 1993. Cet institut multidisciplinaire et tourné vers
l'international correspond bien à son désir de ne pas s'enfermer dans un
sujet ou un petit groupe.
Il y développe d'abord une méthodologie
et un logiciel statistique, Sunset, pour évaluer la qualité des
prédictions du code de calcul thermohydraulique Cathare1.
Constitué d'un noyau stable, Sunset peut être assorti d'extensions selon
le sujet à traiter. Ouvert et bientôt libre2, c'est “un
véritable outil de communication, qui permet de travailler avec beaucoup
de monde et répond à de nombreux besoins, car il quantifie les
incertitudes qui sont partie intégrante des métiers de
l'Institut.”
Dialogue et communication sont pour Éric Chojnacki à la fois la racine
et le fruit de la recherche scientifique. Lorsqu'en 1998, il se consacre à
la modélisation du risque en sûreté et radioprotection (vaste champ
d'étude, transversal au sein de l'IRSN), il participe avec Sunset aux
travaux d'évaluation de l'incertitude sur les taux de leucémie dans
l'environnement des installations de la Hague, au sein du groupe
radioécologie Nord-Cotentin, mais aussi à l'analyse d'incertitudes sur les
accidents de dimensionnement de réacteurs nucléaires dans le projet
Bemuse3 de l'Ocde/CSNI. Nommé expert en analyse d'incertitude
et statistique du risque en 2006, il collabore avec de nombreux
partenaires, aborde des problématiques diverses, croise des approches
multiples dans des projets multipartites et multidisciplinaires tels que
Prime4, Eccorev Adage5. Un tel comportement ne va
pas sans une certaine... prise de risque. “Il faut être prêt à entrer
dans des sujets que l'on ne connaît pas, ne pas avoir peur de revendiquer
des choses à la limite de la légitimité.” Aussi, passe t-il beaucoup
de temps à se former, par lui-même.
Il peut ainsi déployer son
talent : tisser des liens entre ingénieurs et chercheurs, théorie et
pratique : “J'aime faire se chevaucher des domaines différents,
pour que les connaissances des uns se nourrissent de celles des autres et
que des solutions originales émergent.” N'en ferait-on pas un adage
scientifique ?
Contact :
Éric Chojnacki (Laboratoire d'étude de l'incendie et de
développement de méthodes de simulation et d'incertitudes - Limsi)
1. Cathare :
logiciel de thermohydraulique développé par le CEA, l'IRSN, EDF et
Framatome-ANP.
2. Sunset devrait
être accessible en open source au cours du premier semestre
2011.
3. Bemuse :
Best-Estimate Methods - Uncertainty and Sensitivity Evaluation / Méthodes
"Best-Estimate" - Évaluation des incertitudes et analyse de sensibilité.
4. Prime :
Projet de Recherche sur les Indicateurs de la sensibilité radioécologique
et les méthodes Multicritères appliqués à l'Environnement d'un site
industriel
5. Eccorev Adage
(Projet sur la gestion des risques naturels dans le cadre de la fédération
de recherche Écosystèmes continentaux et risques
environnementaux)
Métrologie
Vers
une meilleure mesure de la radioactivité dans les filtres de
surveillance de l'air
Une nouvelle méthode
numérique a été mise au point par Tony Geryes durant sa thèse pour
déterminer les facteurs correctifs qui sont liés à l'atténuation du
rayonnement α dans les filtres de surveillance de l'air et doivent être
appliqués à la mesure de l'activité déposée dans ces filtres.
La surveillance de la radioactivité α dans l'air, en particulier dans
l'environnement des installations nucléaires, est effectuée à l'aide de
dispositifs de prélèvement d'air équipés de filtres qui captent les
aérosols porteurs de la radioactivité présents dans l'air prélevé.
L'activité déposée dans ces filtres est alors mesurée par comptage global.
Or cette mesure peut être faussée car une partie du rayonnement α est
absorbée par la matière du filtre ou par les aérosols accumulés dans le
filtre et à sa surface. Pour déterminer numériquement les facteurs
correctifs liés à l'atténuation du rayonnement α, Tony Geryes, dans le
cadre de sa thèse, a étudié la pénétration des aérosols radioactifs dans
ces filtres.
[
Étude expérimentale... ]
Dans
un premier temps, Tony Geryes a analysé expérimentalement l'influence, sur
la mesure de la radioactivité, des mécanismes de dépôt des aérosols
radioactifs dans les filtres. À l'aide du banc d'essais Icare1,
des filtres ont été chargés en aérosols radioactifs dans des conditions
représentatives des prélèvements atmosphériques réalisés autour des
installations nucléaires. Leur étude a abouti à une base de données de
facteurs de correction expérimentaux obtenus en faisant varier les
caractéristiques des dépôts. Elle a ainsi permis de définir l'évolution
des facteurs de correction en fonction de la pénétration des aérosols, de
leurs mécanismes de collecte, du type de filtre et du niveau de la
filtration (en profondeur ou en surface). Elle a en particulier confirmé
l'augmentation de la valeur du facteur de correction à appliquer à la
radioactivité mesurée au fur et à mesure que des aérosols s'accumulent
dans le filtre.
[ ... puis numérique
]
Dans un second temps, Tony
Geryes a simulé numériquement l'atténuation de la mesure de la
radioactivité dans les filtres. Il a tout d'abord reproduit le profil de
pénétration des aérosols radioactifs dans un médium filtrant, grâce à
GeoDict, un code de dynamique des fluides. Il a ensuite simulé
l'atténuation de l'énergie des rayonnements α due à la répartition des
aérosols dans le filtre, grâce au code MCNPXGLO
, qui reproduit le transport de ces rayonnements dans le médium à partir
du profil de dépôt des aérosols obtenu avec GeoDict. Le couplage de ces
deux codes permet ainsi de simuler les spectres en énergie des particules
α, tout en reproduisant l'atténuation de l'énergie, et de calculer les
facteurs de correction liés à cette dernière.
Cette méthode a été
validée en comparant les résultats simulés avec les mesures expérimentales
en laboratoire. Afin de pouvoir l'utiliser dans le cadre de la
surveillance du territoire, il reste à vérifier si les coefficients ainsi
obtenus sont représentatifs de ceux qui seraient obtenus à partir de
filtres de terrain. L'étude est en cours.
Laboratoire National Henri Becquerel.
Contact :
Céline Monsanglant-Louvet (Laboratoire de physique et de
métrologie des aérosols - LPMA)
1. Icare est un banc
d'essais qui permet de produire des aérosols radioactifs calibrés en
taille et en activité volumique (nombre de désintégrations par seconde
rapporté au volume de l'échantillon mesuré).
Confinement
- Sûreté nucléaire
Étude
de la fissuration d'un béton modélisé à l'échelle mésoscopique
Le choix d'une échelle
intermédiaire pour modéliser le béton permet d'étudier de manière plus
précise les phénomènes de fissuration de ce matériau.
La capacité de confinement du bâtiment abritant un réacteur nucléaire
est évaluée en quantifiant les fuites éventuelles de gaz à travers le
béton de sa paroi. C'est une évaluation complexe pour laquelle The Dung
Nguyen a proposé une modélisation du béton à l'échelle mésoscopique,
intermédiaire entre microscopique et macroscopique. Ce modèle permet
d'examiner l'apparition, la distribution et l'évolution de fissures dans
le béton soumis à des sollicitations mécaniques ou thermiques.
[ Béton numérique
]
À l'aide de la modélisation mésoscopique, The Dung Nguyen représente le
béton comme un milieu hétérogène, composé de granulats enchâssés dans une
pâte de ciment homogène. Les granulats sont distribués aléatoirement dans
l'échantillon de béton à modéliser, en respectant la courbe
granulométrique (distribution des granulats selon leur taille). Ils sont
représentés par des inclusions circulaires (2 D) ou sphériques (3 D) au
sein d'un maillage représentant le volume de béton étudié. Aux points de
Gauss1 du maillage, une méthode dite diffuse associe les
propriétés des granulats et de la pâte à leurs positions. Le modèle de
béton ainsi constitué a été implanté dans le logiciel de simulation
numérique Cast3M, qui utilise la méthode des éléments finis pour résoudre
les problèmes de mécanique des structures.
Testé en deux et trois dimensions en simulant de essais de traction et
compression uni-axiales d'une éprouvette, le modèle mésoscopique du béton
et la stratégie de maillage choisie ont permis de retrouver le
comportement mécanique de l'éprouvette à l'échelle macroscopique, et de
caractériser la distribution de la fissuration et de l'ouverture des
fissures. Cette première validation confirme la capacité de la méthode à
simuler le béton à l'échelle mésoscopique et
macroscopique.
[ Trois applications
]
Le modèle a montré son
efficacité dans trois applications. Dans la première, il a permis de
calculer la perméabilité à l'eau d'un béton soumis à des tractions et
compressions créant des fissures (essai Bipede2). La seconde a
consisté à calculer l'état initial des contraintes, dû à l'hydratation du
béton au moment de sa fabrication. Enfin, la troisième application a
permis de représenter les effets d'échelle, qui caractérisent la
résistance d'une structure en fonction de sa taille. Comparés aux données
expérimentales, les résultats sont très satisfaisants. L'ensemble de ces
tests ont montré l'intérêt de l'approche mésoscopique, surtout en 3D. Il
reste des améliorations à apporter, notamment en optimisant la
représentation de la taille des granulats, et en intégrant les paramètres
non linéaires tels que la plasticité et le fluage.
Laboratoire Lasagec de l'Université de Pau-Pays de
l'Adour.
Contact : Georges
Nahas (Bureau d'analyse du génie civil et des structures - BAGCS)
1. Les points de
Gauss sont les points d'intégration auxquels sont appliquées les
pondérations dans la méthode aux éléments finis.
2. Base
d'identification de la perméabilité et de la dégradation (Gérard,
1996).
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Déchets
radioactifs - Géosciences
Les
processus de transport des contaminants dans
l'argilite |
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Au regard de l'hypothèse de stocker en
profondeur les déchets radioactifs à vie longue dans une
roche argileuse, le rôle de l'IRSN est d'évaluer la
sûreté d'un tel dispositif. À cette fin, l'Institut mène
des recherches dans un ancien tunnel ferroviaire à
Tournemire (Aveyron), creusé dans une roche argileuse
très compacte, l'argilite. Trois thèses récentes ont
étudié différents mécanismes de transport possibles des
radionucléides dans la roche, de l'analyse microscopique
de pores capillarisés sous atmosphère sèche aux
phénomènes d'osmose thermique et chimique, en passant
par le suivi de traceurs naturels. |
Pour un éventuel stockage des déchets radioactifs en
profondeur, le milieu argileux est considéré comme une
barrière géologique dont le rôle est, notamment, de confiner
les radioéléments dans l'espace et dans le temps. La roche
argileuse actuellement étudiée pour ce projet par l'Andra
(laboratoire de Bure en Meuse/Haute-Marne), appelée argilite,
se caractérise par sa faible teneur en eau et la très petite
taille de ses pores, ce qui la rend très peu perméable.
Toutefois, la présence de discontinuités dans la roche, tout
particulièrement des fissures, peut modifier les processus de
transport de l'eau et des radionucléides, et créer des voies
d'écoulement préférentielles menant à la dispersion des
radionucléides par advectionGLO.
Trois thèses récentes soutenues à l'IRSN ont investigué
quelques-uns de ces processus de transport.
[ Transport à
travers les fissures dans les milieux endommagés
]
Ainsi, le creusement, puis l'exploitation
des ouvrages souterrains imposent à la roche des
sollicitations mécaniques, hydrauliques, hydriques et
thermiques qui la perturbent et peuvent conduire à une
fissuration des parois. L'IRSN explore cette problématique
dans son laboratoire de recherche situé dans un ancien tunnel
ferroviaire à Tournemire (Aveyron) et creusé au sein d'une
argilite comparable à celle étudiée par l'Andra. Dans sa
thèse, Majda Bouzid a cherché à comprendre comment, à
l'intérieur des pores de la roche, des modifications des
caractéristiques physicochimiques (taille des pores, humidité
relative, nature de la solution) peuvent avoir un effet sur le
milieu poreux, et au-delà, sur la propagation des fissures.
Elle a effectué en laboratoire des expériences sur des
analogues du réseau poreux et de l'eau porale de la roche
argileuse. Elle a ainsi identifié deux types de mécanismes
susceptibles d'affecter le réseau poreux à la suite d'une
modification de la composition chimique de la solution porale
par évaporation.
Le premier type de mécanisme est
l'apparition d'une contrainte mécanique qui résulte de la
précipitation de sels. Cette contrainte mécanique prend
elle-même deux formes. La première forme, la pression de
cristallisation, est la pression exercée par le précipité
contre les parois du pore. La seconde forme de contrainte
est la traction capillaire. Ce phénomène apparaît dans les
zones non saturées de l'argilite, où l'eau se trouve sous ses
trois phases en équilibre et ne s'écoule pratiquement
plus : l'eau est dite capillaire. Cet équilibre se crée
grâce à une diminution de la pression interne de l'eau, ce qui
induit une traction sur les parois du pore et les déforme.
Cette traction capillaire constitue une voie de dégradation de
l'intégrité structurale de l'argilite encore peu examinée
jusque là. Pression de cristallisation et traction
capillaire pourraient entraîner, à l'échelle de la roche, des
déformations et donc conduire à la propagation des fissures le
long des strates, qui sont ses zones de faiblesse.
Second type de mécanisme : les transitions de phase,
qui font passer une solution porale d'un état stable à l'état
métastable. Ce phénomène se produit avec l'évaporation de
l'eau porale, qui génère un phénomène de capillarité par la
formation de bouchons de sels. Ceux-ci isolent partiellement
les pores et peuvent conduire à une instabilité
thermodynamique de l'eau piégée, qui passe à l'état surchauffé
avec l'apparition de bulles de gaz. La précipitation des sels
peut donc modifier les caractéristiques des pores et leur
organisation entre eux, tout en changeant les propriétés de
transport. Ces transitions de phase montrent également que
cette apparition de sels modifie drastiquement les propriétés
thermodynamiques de l'eau porale.
[
Transport par diffusion moléculaire
]
En l'absence de fissure, la diffusion
moléculaire est le mode de transport supposé dominant des
radioéléments dans l'argilite. Elle est provoquée par un
gradient de concentration qui tend à homogénéiser la
répartition de toutes les espèces chimiques dissoutes dans les
pores de la roche. Pour étudier la diffusion dans les
formations argileuses compactées de Tournemire et de l'Est du
Bassin de Paris, Fethi Bensenouci a, pendant sa thèse, observé
les traceurs naturels mobiles dans l'eau porale d'échantillons
d'argilite.
Plus précisément, il en a établi les profils, c'est-à-dire
les courbes de concentration obtenues selon l'axe vertical du
forage dont sont issus les échantillons. Ces profils sont
considérés comme des expériences naturelles sur des échelles
de temps et d'espace comparables à celles d'un stockage
géologique de déchets radioactifs, et qui permettent de
préciser les propriétés et modes de transport les ayant
affectés.
En pratique, Fethi Bensenouci a observé les
isotopes stables de l'eau, les anions mobiles (chlorures,
bromures et dans une certaine mesure les sulfates) et enfin
les gaz rares (e.g. hélium). Les chlorures se distinguent
comme les traceurs les plus productifs en termes d'information
sur le transport des espèces dissoutes et leur histoire dans
les formations argileuses. À un degré moindre, les isotopes
stables de la molécule de l'eau, surtout le deutérium,
constituent aussi une source d'information sur son transport,
mais dont les incertitudes augmentent proportionnellement à
l'âge de la formation étudiée. En effet, l'évolution complexe
des teneurs en isotopes stables de l'eau dans les aquifèresGLO
et dans la formation argileuse limite l'étude de ces isotopes
aux périodes les plus récentes de l'âge de la formation. Quant
à l'hélium, il ne s'est pas révélé être un bon chronomètre,
mais il a permis de vérifier que la diffusion reste le mode de
transport dominant dans des formations comme celles de
Tournemire.
[ Transport par
osmoses chimique et thermique
]
Les autres mécanismes qui peuvent
affecter le transport de l'eau et des radionucléides sont les
échanges osmotiques, phénomènes peu investigués jusqu'alors et
étudiés par Joachim Tremosa durant sa thèse. L'osmose chimique
et l'osmose thermique sont des mouvements d'eau respectivement
dus à un gradient de potentiels chimique et
thermique.
L'osmose chimique est liée au mécanisme
d'exclusion anionique (les charges négatives des particules
d'argile repoussent les anions vers le centre des pores) et à
la taille des pores. Plus grande est la concentration
d'anions, plus forte est l'osmose chimique. Pour quantifier ce
processus dans l'argilite, Joachim Tremosa a amélioré un
modèle électrique d'interactions existant, le modèle triple
couche, pour qu'il rende compte de l'impact de solutions
multi-ioniques sur l'osmose chimique. En effet, ce type de
solution est proche de la composition des eaux porales à
Tournemire, qu'il a également modélisées.
L'osmose
thermique est quant à elle due au gradient de température qui
crée un flux d'eau du milieu le plus chaud vers le milieu le
plus froid. Peu d'informations existaient sur ce phénomène, et
un modèle théorique de la thermo-osmose a donc été créé. Il
est fondé sur la modification des liaisons hydrogène autour
des molécules d'eau proches de la surface des pores de la
roche ; il dépend de paramètres tels que la température,
la salinité, la porosité et les interactions fluides-solides
du milieu.
Les modèles des deux processus osmotiques
ont été validés au cours d'expériences en laboratoire et
in situ à Tournemire, premières expériences au monde sur
une roche argileuse naturelle pour la
thermo-osmose.
Ces travaux ont permis à Joachim Tremosa
d'estimer l'effet de l'advection et des deux types d'osmose à
l'échelle de la couche argileuse. Alors que le phénomène
d'osmose chimique, tout comme celui de l'advection, crée un
flux descendant, l'osmose thermique produit un flux ascendant
qui s'oppose aux autres flux et peut contribuer à transférer
des radionucléides vers la biosphère. Ce phénomène n'a,
jusqu'à présent, pas fait l'objet d'études approfondies sur
les sites potentiels de stockage de déchets radioactifs en
couche argileuse, y compris celui de l'Andra. Son étude sera
donc poursuivie.
Les universités d'Orsay et d'Orléans
(thèse de Majda Bouzid), le CNRS dans le cadre du GNR Trasse,
les universités d'Orsay et de Bern (Suisse) et le programme
national TAPSS2000 (thèse de Fethi Bensenouci), Amphos XXI
(Barcelone, Espagne) et le BRGM (thèse de Joachim
Trémosa).
Contact : Jean-Michel
Matray (Laboratoire de recherche sur le stockage géologique
des déchets et les transferts dans les sols - LR2S)
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