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Préserver
la construction de l'Europe de la recherche |
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À l'heure où les négociations politiques ont
commencé sur la dotation du 8ème Programme cadre
(PC), baptisé du nom prometteur d'« Horizon 2020 »,
certains des derniers projets du 7ème PC
préfigurent des modes de fonctionnement toujours plus
intégrés. L'IRSN participe à cinq de ces projets.
Impérieuse nécessité que celle d'améliorer
l'efficacité des systèmes de recherche, compte tenu des
réalités budgétaires. Dans ses arbitrages, la Commission
européenne devra veiller à protéger les instruments qui
poussent les laboratoires et les organismes dans un sens
vertueux, à savoir le financement des plateformes thématiques
de recherche. Celles-ci doivent mettre en mouvement les
agendas stratégiques de recherche qu'elles ont élaborés au PC
précédent.
Eu égard à son investissement dans
les projets européens, la préoccupation de l'IRSN est
double : d'un côté, s'assurer que le financement Euratom
reste suffisamment fort pour jouer son rôle de moteur des
progrès en sûreté et radioprotection ; de l'autre, éviter
qu'une part trop importante du budget soit réservée au Centre
commun de recherche de Petten et à la fusion. Il importe que
la Commission et les États membres soient vigilants pour
préserver la construction de l'Europe de la recherche dans les
domaines de la sûreté nucléaire et de la radioprotection.
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Matthieu
Schuler, Directeur de la stratégie, du développement et
des partenariats
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Epidémiologie
L'impact
de l'erreur de mesure sur l'évaluation du risque
L'épidémiologie est l'un des outils utilisés pour quantifier les
risques associés à de faibles doses de rayonnements ionisants chez
l'homme. L'une des difficultés de cette approche est de disposer de
données précises sur les doses auxquelles ont été exposées les
personnes. En effet, les valeurs utilisées peuvent comporter des
erreurs de mesure ou d'estimation qui influent sur la quantification
de la relation entre la dose et l'effet. Afin d'améliorer cette
évaluation, R. Allodji a mis en place durant sa thèse une méthode
statistique pour évaluer l'impact des erreurs de mesure.
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Influence de l'ampleur des
erreurs de mesure sur l'estimation du risque relatif de décès
par cancer du poumon. Cette figure montre que la présence
d'erreurs entraine une sous-estimation de la relation
exposition-risque, et que le biais est d'autant plus grand que
l'ampleur de l'erreur est grande. Résultat obtenu grâce à
l'étude de
simulation. | Cette méthode
a été appliquée aux données de l'étude épidémiologique que l'IRSN
mène de longue date sur la cohorte des mineurs d'uranium français
(5086 mineurs français, suivis pendant 30 ans entre 1946 et 1999),
et plus précisément, sur l'estimation de la relation entre
l'exposition au radon et le risque de décès par cancer du poumon.
[ 1000
cohortes simulées ]S'appuyant sur des
archives et des interviews d'experts, R. Allodji a d'abord quantifié
les erreurs sur la mesure de l'exposition au radon des mineurs.
Avant 1970, leur ampleur pouvait dépasser 45 % des valeurs
mesurées ; puis la précision de la mesure s'est améliorée au
cours du temps puisqu'après 1982, leur ampleur n'était plus que de
10 %. Puis, il a simulé des cohortes semblables à celle des
mineurs d'uranium français. 1000 cohortes de 5086 mineurs ont été
ainsi créées de façon statistique, avec des
caractéristiques (1) notamment d'exposition, générées
aléatoirement sur la base des distributions observées dans la
cohorte réelle. R. Allodji a ensuite inséré dans la construction des
cohortes simulées les erreurs de mesure estimées dans la première
partie de son travail. Les résultats ont montré que, dans l'exemple
étudié, la valeur moyenne de la relation dose-effet des cohortes
simulées sans postuler d'erreurs de mesures est supérieure de près
de 60 % à celle des cohortes simulées en prenant en compte ces
erreurs. Négliger les erreurs peut donc conduire à sous-estimer la
relation exposition-risque. [ Trois méthodes
testées ] Enfin, R. Allodji a évalué
l'efficacité de trois méthodes statistiques de correction
recommandées dans la littérature. Elles rectifient partiellement le
biais induit par les erreurs de mesure ; de plus, leurs
performances sont tributaires de la bonne détermination de ces
erreurs. Ce travail montre que l'estimation par l'épidémiologie du
risque sanitaire des faibles doses de rayonnement est très sensible
aux erreurs de mesure, et plus largement à la qualité des données.
Il souligne l'importance de connaître précisément l'exposition des
individus concernés mais aussi de mettre au point une méthode de
correction fiable pour mieux quantifier les risques. Inserm et Université de Rouen, Institut Pasteur,
Université Paris 5.
Contact :
Dominique Laurier (Laboratoire d'épidémiologie des
rayonnements ionisants - Lepid)
(1)
Dates de naissance et d'emploi, début et durée de l'exposition au
radon, exposition cumulée et nombre de décès par cancer du
poumon.
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ASTEC
Acronyme de Accident Source Term Evaluation Code. Système de
logiciels dont l'objet est de simuler l'ensemble des phénomènes qui
interviendraient au cours d'un accident de fusion du coeur d'un
réacteur nucléaire à eau sous pression.
BARRIÈRES
DE CONFINEMENT
Les réacteurs nucléaires à eau sous pression français
présentent trois barrières successives de confinement des
radionucléides : la gaine des crayons de combustible, le
circuit de refroidissement du réacteur, dit circuit primaire, et
l'enceinte de confinement.
IMMUNITÉ
INNÉE
Système de défense qui induit une réponse cellulaire rapide
dirigée contre des antigènes communs à un large spectre de
pathogènes.
IMMUNITÉ
ADAPTATIVE
Réponse cellulaire spécifique pour un antigène donné. On
distingue la réponse humorale assurée par les lymphocytes B
(génération d'anticorps) et la réponse cytotoxique assurée par les
lymphocytes T (destruction des cellules infectées).
PATHOLOGIE
DU BÉTON
Par analogie au domaine médical, évolution liée soit au
matériau, soit à des facteurs externes, qui dégrade les propriétés
du béton.
THROUGH
DIFFUSION
Le principe de la diffusion traversante, ou through-diffusion,
repose sur la diffusion d'un traceur à travers une tranche
d'échantillon poreux. |
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COLLABORATIONS
Neuf nouveaux projets européens
Neuf projets européens impliquant l'IRSN ont été
retenus au dernier appel d'offres du 7ème Programme
cadre (PC). En pleine transition entre le 7ème et
le 8ème PC, une majorité de ces projets visent un
approfondissement de la coordination au sein des plateformes
européennes : c'est le cas des projets Operra et Comet en
radioprotection, en lien avec l'Alliance en radioécologie et
Melodi ; c'est aussi le cas de Nugenia Plus, Esnii-Plus,
NC2i-R en sûreté nucléaire, en lien avec la plateforme SNE-T/
P. Les autres projets (Eagle, Sarrah2020, WinSR) vont
contribuer au développement des travaux dans ce nouvel
environnement européen. Le neuvième projet AsamPSA-E, piloté
par l'IRSN, concerne l'harmonisation des méthodes d'études
probabilistes de sûreté.
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Intervention de Jacques
Repussard, président de l'association Melodi et
directeur général de l'IRSN au symposium « Benefits
and Limitations of Nuclear Fission for a Low Carbon
Economy », à Bruxelles les 26-27 février
2013. | Résultats
ANR Investissements d'avenir pour la sûreté et la
radioprotection 14 projets impliquant l'IRSN,
dont 7 pilotés par l'Institut, ont été retenus en mai 2013
suite à l'appel à projets du programme d'investissements
d'avenir « nucléaire de demain ». Celui-ci a été
lancé par l'État pour renforcer l'expertise et approfondir les
recherches en sûreté nucléaire et en radioprotection suite à
l'accident de Fukushima. Doté de 50 millions d'euros, cet
appel à projets privilégiait le financement de projets
collaboratifs, incluant des partenaires universitaires et
industriels. Convention HAL
L'IRSN a signé le 2 avril 2013 la convention de partenariat
soutenue par le ministère de l'Enseignement supérieur et de la
recherche en faveur des archives ouvertes et de la plateforme
mutualisée HAL (Hyper articles en ligne). Cette initiative
vise à améliorer l'archivage et l'accès (en mode « open
access ») aux publications scientifiques et aux thèses
émanant d'établissements de recherche. 25 établissements
publics ont signé cette convention.
CONGRÈS
Water Rock Interaction
L'IRSN a participé à l'organisation du symposium Water Rock
Interaction qui s'est déroulé à Avignon du 9 au 14 juin 2013.
Les travaux ont porté sur les processus chimiques et physiques
qui contrôlent la composition des systèmes eau-roche naturels
et l'impact des intrusions anthropiques.
+++ Site
internet du congrès WRI 14.
Neudos 12
Organisée par l'IRSN, en coopération avec l'AIEA et le
réseau Neudos, la 12ème édition du symposium Neudos
s'est tenue à Aix-en-Provence du 3 au 7 juin 2013. Ce
symposium rassemble tous les 3 à 4 ans les spécialistes de la
dosimétrie des neutrons.
+++
Site internet du congrès Neudos 12.
SOUTENANCES
HDR
Deux habilitations à diriger des recherches ont été
soutenues durant le deuxième trimestre 2013 : Olivier
Simon le 9 avril 2013 sur le thème de l'Intégration de
l'étude de la biodistribution des polluants dans l'évaluation
du risque écologique. Vers l'émergence d'une valeur seuil de
bioaccumulation toxique. Rodolphe Gilbin le 24 juin 2013
sur le thème : Biodisponibilité des éléments traces
métalliques et des radionucléides en milieu aquatique
continental : Implications pour l'évaluation du risque
écologique dans un contexte de multi-contamination.
+++ La
soutenance d'HDR d'Olivier Simon. +++ La
soutenance d'HDR de Rodolphe Gilbin.
Thèse
Jean-Victor
Lacavé-Lapalun a soutenu sa thèse de doctorat intitulée
Réponse immunitaire induite par l'irradiation
colorectale : manipulation thérapeutique des « toll
like receptors » le 16 mai 2013 à l'école de
médecine de l'hôpital St. Antoine à Paris.
+++ La
thèse de Jean-Victor Lacavé-Lapalun.
PUBLICATION
Bilan formation par la
recherche
L'IRSN a publié son bilan de la
formation à et par la recherche 2010-2011. Au-delà des
chiffres clés usuels, cette édition se distingue par un
travail approfondi sur l'analyse statistique et qualitative de
l'insertion professionnelle de ces jeunes chercheurs à l'issue
de leur formation.
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Physique/chimie
- Sûreté nucléaire
L'effet
de la RSI sur les propriétés du béton des enceintes de confinement
Troisième et dernière
barrière de sûreté, l'enceinte de confinement en béton qui abrite un
réacteur nucléaire doit présenter des qualités de résistance mécanique aux
agressions (externes et internes), mais aussi d'étanchéité pour confiner
la radioactivité. L'IRSN étudie les effets des « pathologies »
du béton qui peuvent modifier ces performances, notamment la réaction
sulfatique interne (RSI).
La réaction sulfatique interne (RSI) fait partie des
« pathologies »GLO
du béton. Elle peut se développer dans les bétons préfabriqués traités
thermiquement et dans les structures massives, telles les enceintes de
confinement des centrales nucléaires. Elle provoque le
gonflement(1) et la fissuration du béton. La RSI n'est pas à ce
jour suffisamment caractérisée, en raison de la complexité des mécanismes
qui la gouvernent.
La thèse menée par Mohamad Al Shamaa s'est
focalisée sur l'impact des principaux facteurs intervenant dans le
développement de la RSI (humidité, conditions thermiques, constitution du
béton). Ses travaux ont permis de quantifier à l'échelle expérimentale
l'influence de cette pathologie sur les performances de résistance et
d'étanchéité du béton.
[ Une perméabilité plus
élevée ]
Pour ce faire, des expériences ont été
menées sur des « éprouvettes » de béton, qui ont été chauffées
et conservées en atmosphère plus ou moins humide, voire dans l'eau. Sur
des éprouvettes affectées par la RSI, une perte de 23 % de la
résistance en compression a été constatée lorsque le gonflement
caractéristique de la RSI évolue de 0,08 % à 0,20 %. Par
ailleurs, la perméabilité au gaz du béton atteint de RSI apparait
significativement plus élevée que celle du béton initial (d'un facteur 20
pour un gonflement de 0,27 %). Cette augmentation résulte de la
formation de microfissures qui sont susceptibles de former un réseau
connecté, créant ainsi des chemins de fuite préférentiels dans le béton.
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Éprouvettes cylindriques de béton
(diam. : 11 cm, long. : 22 cm). En haut, béton sain. En
bas, béton atteint de RSI. | [ Hygrométrie et
RSI ] L'impact de l'hygrométrie du béton sur le
développement de la RSI a aussi été étudié, et la relation entre
l'humidité environnante et le gonflement a été caractérisée. L'étude
montre notamment que les courbes d'évolution du gonflement sont quasiment
identiques pour des éprouvettes immergées dans l'eau ou maintenues à
100 % d'humidité. La RSI peut donc se déclencher sans immersion dans
l'eau mais avec une humidité proche de la saturation. Cette situation
correspond au cas de structures massives. En effet, l'eau présente dans le
béton ne s'évacue que très lentement (séchage) et la cinétique est
d'autant plus lente que la masse de béton est importante. Les résultats
établissent clairement que le squelette granulaire du béton a une forte
influence sur la cinétique et l'amplitude du gonflement. L'enjeu est à
présent d'étudier de quelle manière les résultats obtenus durant cette
thèse peuvent être transposés à l'échelle des ouvrages réels. C'est un
nouveau thème de recherche qu'il convient d'explorer pour permettre
d'évaluer la tenue dans le temps des enceintes de confinement lors des
réexamens de sûreté des réacteurs. IFSTTAR, ENS Cachan.
Contact :
Georges Nahas (Bureau d'expertise du génie civil - BEGC)
(1) Le
gonflement qui accompagne la RSI est attribué à la formation de cristaux
d'ettringite (hydrate de sulfate, de calcium et d'aluminium).
Déchets
radioactifs - Physique/chimie
Le
comportement de l'argilite face au CO2
Afin de renforcer sa
capacité à évaluer la sûreté d'un stockage en profondeur de déchets
radioactifs de haute activité, l'IRSN mène ses propres programmes de
recherche sur l'argilite. Le dioxyde de carbone (CO2) présent
dans le stockage étant susceptible de modifier les propriétés de
l'argilite, l'institut a cofinancé une thèse sur ce sujet.
Des volumes limités de dioxyde de carbone seront emprisonnés dans un
stockage de déchets radioactifs construit dans l'argilite, tel que le
projet Cigéo de l'Andra qui fait actuellement l'objet d'un débat public.
Or, le CO2 en solution génère de l'acide carbonique qui peut
dissoudre les minéraux carbonatés de cette roche, ce qui peut avoir un
impact sur sa capacité de confinement. Pour comprendre ce phénomène,
l'IRSN a cofinancé la thèse de Guillaume Berthe qui porte sur les
propriétés de confinement de l'argilite utilisée pour le stockage des
déchets mais également envisagée pour celui du
CO2(1). Cette thèse s'inscrit dans le cadre du
projet Coliner de l'Agence nationale de la recherche, dont l'objectif
était d'évaluer les capacités de l'argilite à assurer l'étanchéité des
stockages de CO2.
[ Points de
faiblesse ]
G. Berthe a étudié trois faiblesses
de l'argilite vis-à-vis de la réactivité au CO2 : la
composition minéralogique, l'existence de fissures naturelles remplies de
calcite et la présence d'interfaces argilite/ciment (existant au niveau
des puits d'injection de CO2). Afin de tester ces différents
facteurs, des argilites de différentes minéralogies (i.e. teneur en
carbonate), recoupées ou non par une veine de calcite (minéral
particulièrement sensible à l'acide carbonique) et en interface ou non
avec une pâte de ciment, ont été sélectionnées. Les échantillons étudiés
proviennent de la station expérimentale de Tournemire (Aveyron) de l'IRSN.
Grâce à un montage expérimental original utilisant le principe de la
« through diffusion »GLO,
la diffusion de différents éléments chimiques a été quantifiée avant et
après que la roche a été mise en présence d'une solution d'acide
carbonique, dans des conditions de pression et température représentatives
du milieu argileux.
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Cliché au microscope électronique
à balayage du gradient de calcium obtenu sur un échantillon
d'argilite de Tournemire coupée par un sillon rempli de pâte de
ciment (forme de doigt) après mise en présence de l'acide
carbonique. L'argilite n'a pas réagi, en revanche, le ciment montre
une zone bleue pauvre en
calcium. | [ Mécanismes de
fuite ] Les expériences ont montré que, quelle
que soit la proportion de minéraux carbonatés de la roche, la diffusion
des traceurs utilisés (chlorure et deutérium notamment) augmente lors
d'une attaque à l'acide carbonique. Par ailleurs, la présence de fissures
naturelles remplies de calcite engendre systématiquement des
courts-circuits favorisant le passage de l'eau. Enfin, il s'avère que la
dégradation des propriétés de confinement de l'argilite est compensée, à
l'échelle de cette étude, par l'amélioration de celles du ciment induite
par la précipitation de carbonates. Ces résultats contribuent à
caractériser les mécanismes de fuite à travers une roche-couverture de
type argilite. De plus, ces données expérimentales améliorent la
modélisation du transport d'éléments au sein des argilites. Lafarge, Total, CEA, FAST, CSIC, Géoscience
Montpellier.
Contact :
Charles Wittebroodt (Laboratoire d'étude et de recherche sur les
transferts et les interactions dans les sols - Letis)
(1) L'une
des solutions envisagées pour limiter l'accumulation de gaz à effet de
serre dans l'atmosphère est de capter le dioxyde de carbone rejeté par les
industries les plus émettrices, et de le stocker en couche géologique
profonde. Les zones de stockage envisagées sont des réservoirs naturels
comme par exemple des gisements de gaz ou d'hydrocarbures en fin
d'exploitation ou des veines de charbon inexploitables. Pour éviter toute
fuite de gaz vers les couches géologiques supérieures et la surface, la
présence d'une roche-couverture (argile, sel…) assurant une étanchéité
efficace du stockage est indispensable.
Déchets
radioactifs - Physique/chimie
À
l'interface du fer et de l'argilite
Afin de pouvoir
évaluer la sûreté d'une installation de stockage géologique de déchets
radioactifs de haute activité, l'IRSN mène ses propres recherches sur les
caractéristiques de la roche hôte, en l'occurrence l'argilite. L'un des
axes d'étude concerne l'évolution des propriétés de confinement de
l'argilite lorsqu'elle est mise en contact avec d'autres matériaux, tels
que l'acier des conteneurs.
Les caractéristiques de l'argilite et ses qualités de confinement
peuvent être modifiées par tout élément étranger à la roche. C'est le cas
en particulier de l'acier qui est le constituant principal des conteneurs
de déchets, de leur sur-conteneur et du tubage des alvéoles qui vont les
accueillir. De même, la résistance à long terme de l'acier peut être
altérée au contact de l'argilite. Dans le but de caractériser ces
phénomènes, Anaïs Maillet a étudié durant sa thèse les interactions entre
l'argilite et le fer métal dans la zone de contact entre ces deux
matériaux.
[ Interface
acier/argilite ]
Son travail a porté sur des
disques d'acier au carbone placés en 2000 dans une zone saturée en eau, au
coeur de l'argilite, sur le site expérimental de l'IRSN à Tournemire
(Aveyron). Les prélèvements qu'elle a effectués aux interfaces
acier/argilite en 2010 (d'autres avaient été faits en 2002 et 2006)
montrent que l'acier au carbone est corrodé jusqu'à 0,2 mm de
profondeur, entraînant la diffusion de fer dans l'environnement argileux.
Ce panache perturbe l'argilite naturelle en moyenne sur quelques microns
mais peut diffuser jusqu'à 5 mm. Les mécanismes chimiques identifiés
induisent des évolutions opposées dans les microstructures de l'acier et
de l'argilite. Ainsi, l'acier a acquis jusqu'à 15 % de porosité dans
sa zone de corrosion ; inversement l'argilite est partiellement
colmatée par la précipitation d'oxyhydroxydes de fer.
[ Zone enrichie en
soufre ]
Ces phénomènes dépendent fortement de
la durée pendant laquelle il reste de l'oxygène disponible (période
appelée transitoire oxydant). Pour déterminer cet élément clé, A. Maillet
a réalisé des modélisations couplant la chimie et le transport des solutés
au travers des pores de la roche, en utilisant les évolutions observées à
2, à 6 et à 10 ans dans l'acier et dans l'argilite. Elle a ainsi identifié
que l'oxydation dure entre 4 et 6 ans, c'est-à-dire plus longtemps que
prévu initialement.
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Échantillons d'argilite avec des
disques d'acier au carbone (a) ; en (b), vue de l'interface
inférieure qui montre une forte corrosion de l'acier ; en (c),
échantillon d'argilite avec de l'acier
réfractaire. | Enfin, elle a
également systématiquement constaté qu'après 10 ans d'interaction, la zone
de corrosion de l'acier s'est enrichie en soufre, en lien avec la présence
de bactéries (bactéries sulfato- réductrices). Leur présence peut
expliquer l'épaisseur conséquente d'acier corrodé. En termes de sûreté,
les mécanismes réactifs susceptibles de se produire aux interfaces
fer/argilite après fermeture des alvéoles de stockage ont ainsi été
identifiés. Ces résultats complètent les bases de données utilisées pour
les modélisations à long terme de l'évolution du stockage. CNRS/Université de Poitiers, CNRS/Université de
Nantes, EDF.
Contact :
Alexandre Dauzères (Laboratoire d'étude et de recherche sur les
transferts et les interactions dans les sols - Letis)
Irradiation
- Patients
Mécanismes
d'action des cellules souches adultes sur l'inflammation
radio-induite
La radiothérapie,
incontournable pour traiter les cancers de la zone pelvienne, est un
compromis entre le contrôle de la tumeur et les dommages aux tissus sains
situés dans le champ d'irradiation, qui peuvent entraîner des
complications gastro-intestinales parfois très invalidantes. Les
recherches de l'IRSN visent à comprendre la physiopathologie des lésions
radio-induites afin de proposer des traitements mieux adaptés à la
protection des tissus sains.
Dans la zone pelvienne, la radiothérapie entraîne la mort des cellules
souches du côlon(1) et une inflammation du tissu. Pour 3 à
15 % des patients, des lésions chroniques fibrotiques
apparaissent : inflammation, processus cicatriciel exagéré et réponse
vasculaire anormale, pour lesquelles il n'existe pas de traitement
efficace. Trouver de nouvelles thérapies nécessite de comprendre les liens
entre les lésions induites par les rayonnements ionisants et
l'inflammation.
[ Panorama in vivo ]
La
thèse de Raphaëlle Bessout a d'abord établi un panorama in vivo
de l'effet de l'irradiation sur les cellules et molécules de l'immunité.
Des rats ont été irradiés au niveau de la zone colorectale à une dose de
27 Grays. Elle a montré que l'irradiation du côlon induit une réaction
immunitaire forte avec une augmentation de la présence de cellules de
l'immunité innéeGLO
(globale et immédiate) et adaptativeGLO
(cellules spécifiques-lymphocytes T) ainsi que l'augmentation de certaines
molécules inflammatoires. L'analyse détaillée des cellules de l'immunité
adaptative a montré que les lymphocytes T sont nombreux, avec un taux
d'activation élevé en local (côlon) et global (sang et ganglions
mésentériques).
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À l'aide d'un marqueur spécifique,
l'expression d'une enzyme du métabolisme des glucocorticoïdes-anti
inflammatoires (HSD11ß1) par les CSM est analysée par
immunofluorescence. Des études d'inhibition in vitro ont démontré
que les gluco-corticoïdes sont impliqués dans l'immunosuppression
des lymphocytes T par les CSM.
| [ Le rôle des lymphocytes
T ] Afin de démontrer l'implication des
lymphocytes T dans les lésions colorectales, ces cellules ont été
artificiellement inhibées chez des rats irradiés. Pour ces animaux, la
réparation naturelle des tissus s'est avérée meilleure que chez les
animaux irradiés témoins. Ces résultats démontrent que les lymphocytes T
participent au maintien des lésions radio-induites du côlon. Une thérapie
qui les ciblerait améliorerait donc la guérison des lésions
radio-induites. R. Bessout a par ailleurs étudié l'effet d'une
injection de cellules stromales mésenchymateuses (CSM) sur les lésions
radio-induites du côlon. Les CSM sont en effet connues pour leurs facultés
de cicatrisation des tissus et d'action anti-inflammatoire (voir Aktis
n° 2 et 12). Elles ont déjà permis de traiter avec succès des
brûlures radiologiques cutanées sévères. R. Bessout a observé que
l'injection de CSM réduit significativement les lésions de la muqueuse du
côlon. De plus, elle a noté que le traitement par CSM diminue le nombre et
l'activation des lymphocytes T par rapport aux animaux irradiés non
traités. Enfin, elle a mis en évidence pour la première fois un nouveau
mécanisme de régulation : l'augmentation de la synthèse de
corticostérone (molécule anti-inflammatoire) suite au traitement par CSM.
Cette thèse a ainsi permis de mieux cerner le mécanisme
d'apparition des lésions colorectales radio-induites, tout en confirmant
l'intérêt de la thérapie cellulaire par CSM.
Contact :
Noëlle Mathieu (Laboratoire de radiopathologie et de thérapies
expérimentales - LRTE)
(1) Les
cellules souches du côlon permettent le renouvellement de la
muqueuse.
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