Savoir et comprendre

Limiter les conséquences d'un accident de criticité

21/05/2012

Les dispositions de prévention des risques de criticité rendent très improbable une divergence incontrôlée dans une installation. Nonobstant, compte tenu des matières fissiles mises en œuvre, un accident de criticité reste physiquement possible (si plusieurs dispositions ne sont plus effectives).
 

Depuis 1945, il s'est produit une soixantaine d’accidents de criticité dans le monde. Une quarantaine de ces accidents est survenue dans des réacteurs de recherche ou dans des laboratoires sur des "assemblages critiques". En outre, malgré des marges de sécurité par nature plus importantes, on recense actuellement vingt-deux accidents survenus dans des installations du cycle du combustible. Ces accidents n’ont pas provoqué de rejets radioactifs significatifs dans l’environnement, mais des irradiations importantes entraînant, dans des délais courts, vingt décès, dont dix dans des installations du cycle du combustible.

Une autre particularité des accidents de criticité est leur durée qui varie de quelques dixièmes de secondes à plusieurs dizaines d’heures. Dans certaines circonstances, des actions spécifiques ont dû être entreprises (injection de poison neutronique…) pour arrêter l’accident.

Aussi, selon les spécificités des installations, il est nécessaire de prévoir des dispositions complémentaires visant à limiter au maximum les conséquences d'un éventuel accident, notamment pour les personnels travaillant dans les installations et pour les personnes susceptibles de se trouver à proximité. Ces dispositions s'articulent autour de trois actions principales : la détection de l'accident, l'organisation de l'évacuation rapide des personnels concernés et, si nécessaire, l'intervention visant à arrêter l'accident.

Réseau de détection et d'alarme de criticité

Eu égard à la cinétique, il n'existe pas de signe précurseur exploitable d'un accident de criticité ; les dispositifs de détection existant utilisent donc l'émission, au début de l’accident de criticité, d'un flux important de neutrons et de rayonnements gamma. Ces systèmes ne permettent donc pas d’éviter les conséquences, potentiellement létales pour les opérateurs situés à proximité, associées au début de l’accident.

En France, les systèmes de détection (EDAC, ensemble de détection et d’alarme de criticité) sont basés sur des groupes de détecteurs (ou sondes), mesurant les débits de dose (neutronique + gamma), et un coffret de traitement de ces mesures pilotant des alarmes sonores et lumineuses spécifiquement associées à l’accident de criticité. Le déclenchement de ces alarmes s’effectue dès que la dose totale et le débit de dose atteignent des seuils prédéterminés. Les détecteurs ont été conçus de façon à limiter au maximum le risque de fausse alarme et sont en outre susceptibles de fournir des informations sur l'accident (évolution dans le temps, évaluation de doses…) utiles pour la conduite de l'intervention.

Evacuation

La limitation des conséquences radiologiques d'un accident de criticité dépend largement d'une évacuation rapide hors de la zone concernée. Le personnel doit donc avoir été entraîné à évacuer les lieux vers des points de rassemblement, selon des cheminements préalablement définis et fléchés. L'optimisation de l'implantation des détecteurs et des chemins d'évacuation résulte de l'étude de scénarios d'accidents propres à chaque installation.

Intervention en cas d'accident de criticité

L'expérience tirée des différents accidents de criticité, en particulier du dernier survenu en 1999 au Japon, montre qu'il peut être nécessaire d'intervenir pour arrêter un accident, en l'absence d'arrêt spontané suffisamment rapide.

Cette intervention peut consister à "empoisonner" le milieu par l'ajout de solution ou de poudre contenant des matériaux neutrophages, à transférer le milieu fissile incriminé vers une géométrie qui garantit un état sous-critique, à éliminer un réflecteur neutronique (par vidange de l'eau du circuit de refroidissement dans le cas de l’accident de Tokaï Mura)…

Au titre du retour d'expérience de cet accident, les autorités de sûreté françaises ont demandé aux exploitants d'installations concernées par les risques de criticité en milieu humide de réexaminer les moyens dont ils disposent pour détecter un accident et de préciser les moyens utilisables pour l’arrêter.

 

Pour plus d'informations télécharger le dossier "Les risques de criticité dans les usines et laboratoires nucléaires