Savoir et comprendre

La gestion d’un accident grave sur un réacteur à eau bouillante

21/05/2012

Spécificités des réacteurs à eaux bouillante concernant la progression d’un accident grave
 

Les réacteurs à eau bouillante (REB) présentent, de par leur conception, des spécificités par rapport aux réacteurs à eau sous pression, pour ce qui concerne l’évolution d’un accident grave :  
 

  • Une masse de Zircaloy environ deux fois plus importante sur les REB qui peut conduire à la production et au relâchement d’une plus grande quantité d’hydrogène dans le confinement 
     
  • De nombreuses structures internes inférieures, présentes sous le coeur, qui devraient permettre une meilleure rétention des produits de fission dans la cuve
     
  • Un important volume d’eau sous le coeur permettant de refroidir plus longtemps les débris du coeur dans la cuve et de retarder la rupture du fond de la cuve en cas de relocalisation du corium dans cette partie de la cuve 
     
  • Une enceinte de confinement métallique de faible volume limitant la quantité des gaz incondensables retenus qui rend nécessaire de procéder à une ouverture des vannes de décharge à l’atmosphère dans certaines situations 
     
  • Une piscine de suppression de pression (suppression pool) qui contribue à retenir les produits de fission par barbotage (cf. schéma n°1).
     

  

Phénomènes physiques intervenant en situation d’accident grave.©IRSN

 

Phénomènes physiques intervenant en situation d’accident grave. © IRSN

 

Stratégies de gestion de l’accident grave sur un REB
 

De manière générale, et comme sur un réacteur à eau sous pression, la stratégie de gestion d’un accident grave sur un réacteur à eau bouillante vise à restaurer le refroidissement du coeur pour retarder ou arrêter la fusion et à maintenir l’intégrité du confinement. Pour ce faire, l’exploitant dispose d’une instrumentation dédiée permettant de connaître le niveau d’eau dans la cuve et les paramètres de pression et température associés.
 

A court terme, la priorité est donnée au refroidissement du coeur par une injection d’eau dans la cuve pour évacuer la puissance résiduelle. Le découvrement du coeur et son éventuel renoyage entraînent une production importante d’hydrogène par réaction entre le zircaloy des gaines et la vapeur d’eau. Le relâchement d’hydrogène dans l’enceinte est susceptible, dans certaines conditions, d’entrainer une combustion plus au moins énergétique et un pic de pression dans l’enceinte. L’application d’un pré-inertage [1] de l’enceinte par de l’azote permet toutefois de limiter fortement le risque de combustion dans l’enceinte.  
 

L’ouverture des vannes de décharge du circuit primaire permet de dépressuriser ce circuit. Cette dépressurisation permet d’éviter la rupture de la cuve à haute pression et de limiter les conséquences d’un éventuel échauffement direct de l’enceinte consécutif à l’éjection de corium [2] et à sa dispersion dans l’enceinte.  
 

Si les alimentations électriques sont présentes, l’utilisation de l’aspersion [3] dans l’enceinte de confinement permet de limiter la montée de la pression dans l’enceinte de confinement et de rabattre les produits de fission.
 

En cas d’indisponibilité de l’aspersion dans l’enceinte, un éventage contrôlé et filtré de l’enceinte permet de maintenir l’intégrité de l’enceinte. Cette filtration devrait permettre de retenir la majorité des produits de fission sous forme d’aérosols.
 

Un refroidissement externe de la cuve peut être mis en oeuvre pour compléter une injection d’eau insuffisante en cuve et éviter la percée de la cuve. En cas de percée de la cuve, le noyage du puits de cuve constitue la seule stratégie de refroidissement des débris de corium avant l’érosion du radier. Une explosion de vapeur consécutive par interaction entre le corium et l’eau pourrait se produire en cas de noyage de la cavité sous la cuve.
 

La vitesse d’érosion du radier et son éventuelle percée dépendent de la composition du béton du radier, de sa géométrie (épaisseur) et de la masse de corium présente dans le puits de cuve et de la présence ou non d’eau.
 

Les conséquences d’un accident grave dépendent principalement du maintien ou non de l’intégrité de l’enceinte, de son étanchéité, et des ses équipements de filtration des rejets ainsi que des caractéristiques du radier.

Notes :

1- L’inertage est une procédure qui consiste à remplacer une atmosphère réactive (oxydante, inflammable, explosive) par un gaz inerte comme l’azote, le CO2 ou l’argon.

2 - Corium : mélange de combustible et de matériaux de structure fondus.

3 - Aspersion : injection de pulvérisations d’eau froide dans l’enceinte de confinement dans le but de faire baisser la pression interne et la température de celle-ci.