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08/11/2013

La thérapie cellulaire

Les rayonnements utilisés en chirurgie interventionnelle sont peu pénétrants. En cas de surexposition, les lésions constatées sont superficielles, essentiellement cutanées, voire musculaires. Le traitement consiste en une excision de la zone nécrosée. Il peut être amélioré grâce à l’injection concomitante de cellules stromales mésenchymateuses, appelées aussi cellules souches. Elle favorise la cicatrisation des parties lésées.

« L’intérêt de la thérapie cellulaire a été démontré grâce à un programme de recherche », explique Marc Benderitter, expert en radiopathologie à l’IRSN. « Celui-ci a commencé il y a six ans, en partenariat avec l’hôpital de Percy (Hauts-de-Seine). Ces cellules ont été utilisées, à titre compassionnel, sur huit patients irradiés souffrant de graves brûlures et chez quatre des irradiés d’Épinal (Vosges). L’objectif était de soulager leurs douleurs, de stopper les saignements, de réduire l’inflammation et de stabiliser l’évolution de la nécrose. » Les espoirs de cette technique sont tels que plusieurs programmes de recherche de l’IRSN cherchent à identifier d’autres cellules aussi efficaces et permettant de traiter d’autres types de lésions radio-induites.

Chaque expertise donne lieu à un rapport. Il est accompagné de recommandations, dont certaines se répètent, comme l’importance de la formation. « À Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme) », se souvient Bernard Aubert, physicien médical à l’IRSN, spécialiste de la radioprotection du patient, « l’équipe d’expertise médicale a optimisé les appareils à la suite d’un incident de radiologie interventionnelle. La dose a ainsi été divisée par trois pour un même niveau d’efficacité : si à 6 grays, il y a des signes de brûlure, à 2 grays, il n’y en a plus. »

Les spécialistes de l’Institut travaillent main dans la main avec les professionnels de terrain. « Lors de nos journées scientifiques de juin 2013, plusieurs experts sont intervenus », se remémore Dominique Le Du, président de la Société française de physique médicale. « Ils ont fait le point sur l’estimation de la dose au patient, sur le retour d’expérience des récents événements de surexposition et sur les perspectives d’évolution des niveaux de référence diagnostiques. »

L’accident survenu en 2007 à l’hôpital de Rangueil du CHU de Toulouse (Haute-Garonne) avait pointé le besoin d’un référentiel pour l’étalonnage des mini-faisceaux. « Après quatre années de recherche menées grâce à la collaboration avec les physiciens médicaux de plusieurs établissements de santé en France, l’IRSN a pu en 2013 mettre à la disposition de la profession un protocole d’étalonnage », poursuit Bernard Aubert.

 

Les cassures de l’ADN

D’autres travaux scientifiques ouvrent de larges perspectives : « Les traitements compassionnels réalisés à la suite de l’accident d’Épinal (Vosges) ont contrôlé l’inflammation et bloqué le processus nécrotique », explique Marc Benderitter. « Avec ces résultats, nous venons de proposer à l’Institut national du cancer une étude clinique sur l’intérêt de ce traitement pour les 3 à 5 % de cas de complications sévères en radiothérapie. »

À plus long terme, des programmes de recherche, comme Rosiris qui a débuté en 2009, amélioreront le traitement des patients. Il cherche à comprendre le lien entre le dépôt d’énergie et les effets aux niveaux cellulaire et tissulaire. « Par exemple, une irradiation crée des cassures de l’ADN lors du passage de la particule ionisante », simplifie Jean-François Bottollier-Depois. « Nous cherchons à identifier les effets cellulaires pour chaque type de particules et d’énergie. »  
 

 

 

3 questions à Pr Jean-Marc Cosset

Radiothérapeute à l’Institut Curie (Paris), ex-membre du comité 3 (radioprotection en médecine) de la Commission internationale de protection radiologique (CIPR), dont le travail participe à la prévention du cancer et d’autres maladies et effets associés à l’exposition à des rayonnements ionisants, et à la protection de l’environnement.

Quels types de collaborations avez-vous avec les experts de l’IRSN ?

Lors de missions confiées par l’Agence internationale de l’énergie atomique, j’ai travaillé avec eux pour définir la stratégie de traitement et le transfert en France d’irradiés accidentels d’Iran, de Géorgie, de Panama, de Pologne…

L’IRSN participe-t-il également au traitement ?

Oui, les chirurgiens opèrent après reconstitution de la dose qu’ils reçoivent de l’Institut : la cartographie réalisée identifie les tissus lésés, même s’ils n’en présentent pas encore tous les signes. Il n’y a qu’une intervention contre cinq ou six successives auparavant. Ceci facilite grandement la prise des greffes.

Quid en termes de prévention ?

L’IRSN a analysé les accidents d’Épinal (Vosges) ou ceux liés à de nouvelles technologies, comme la radiothérapie conformationnelle avec modulation de l’intensité. Ces techniques permettent de « sculpter » le volume irradié, par exemple de traiter une tumeur enroulée autour de la moelle épinière sans irradier celle-ci. Et les travaux de l’IRSN ont alimenté les dernières recommandations internationales de prévention des accidents [1] de la CIPR.

 
     

 

 

Note :

1- Voir la Publication n°112 de la CIPR (en anglais)

 

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