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Analyse des possibilités d’entreposage à sec de combustibles nucléaires usés

15/05/2019

Dans le cadre de la préparation du débat public sur le plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs 2019-2021 (PNGMDR 2019-2021), la Présidente de la Commission nationale du débat public (CNDP) a demandé à l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), par lettre du 15 février 2019, de réaliser une expertise concernant l’entreposage à sec de combustibles nucléaires usés à base d’oxyde d’uranium et de plutonium (MOX) ou à base d’oxyde d’uranium de retraitement enrichi (URE).

 

L’expertise qui a été effectuée par l’IRSN en réponse à cette demande est complémentaire de celle concernant les concepts d’entreposage des combustibles usés sous eau et à sec existants, ainsi que les enjeux de sûreté associés, réalisée par l’IRSN en 2018 à la demande de la commission d’enquête parlementaire sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires en France .

 

L’IRSN a examiné, d’une part la compatibilité́ de certains combustibles MOX et URE actuellement entreposés sous eau avec un entreposage à sec, d’autre part les évolutions envisageables des concepts actuels de transport et d’entreposage à sec qui permettraient de revoir les valeurs repères associées de puissance thermique maximale des combustibles usés, soit moins de 6 kW pour leur transport et de 2 kW pour leur entreposage à sec (cf. expertise précitée).

 

Télécharger le rapport IRSN 2019 – 00265 « Analyse des possibilités d’entreposage à sec de combustibles nucléaires usés de type MOX ou URE » (pdf, 0,88 Mo)

 

Le combustible utilisé dans les réacteurs du parc électronucléaire français est constitué d’oxyde d’uranium naturel enrichi (UNE) ou d’oxyde mixte d’uranium et de plutonium (MOX). Par le passé, du combustible constitué d’oxyde d’uranium de retraitement enrichi (URE) a été utilisé. À la différence des combustibles UNE, les combustibles URE et MOX ne font pas actuellement l’objet d’un traitement. Ils sont entreposés pour refroidissement dans les piscines des réacteurs d’EDF puis dans celles de l’établissement Orano Cycle de La Hague.

 

Les caractéristiques des combustibles MOX et URE utilisés par EDF ont évolué au cours du temps. En particulier, la teneur en plutonium des combustibles MOX a successivement été de 5,30 %, 7,08 % et 8,65 % (teneur des combustibles chargés à ce jour dans les réacteurs d’EDF).

 

La puissance thermique des combustibles MOX usés dépend de cette teneur et de leur taux de combustion. Ainsi, le temps de refroidissement nécessaire à ces combustibles pour que leur puissance thermique devienne inférieure à 2 kW par assemblage, valeur repère retenue par l’IRSN pour considérer possible la mise en œuvre des concepts actuels d’entreposage à sec, est respectivement de l’ordre de 5 ans, 10 ans et 30 ans en considérant le taux de combustion moyen par assemblage.

 

En conséquence, compte tenu des périodes durant lesquelles les combustibles MOX présentant les teneurs en plutonium précitées ont été mis en œuvre, des solutions d’entreposage à sec s’appuyant sur des concepts actuels pourraient, dès à présent, être envisagées pour l’ensemble des combustibles MOX usés de teneur en plutonium égale à 5,30% et pour la plupart de ceux à 7,08%, soit de l’ordre de 2 500 assemblages.

 

Pour les premiers combustibles MOX usés de teneur en plutonium de 8,65 %, mis en œuvre depuis 2007, il faudrait attendre environ 2040 pour pouvoir utiliser ce type d’entreposage. En tout état de cause, pour ce type de combustibles MOX usés, des solutions d’entreposage sous eau sont nécessaires sur une période de l’ordre de 30 ans après la fin de leur irradiation, en considérant la valeur repère de 2 kW associée aux concepts actuels d’entreposage à sec. Pour limiter cette période à une dizaine d’années, il faudrait disposer de concepts d’entreposage à sec conçus avec une puissance thermique par combustible usé de l’ordre de 3 kW.

 

Par ailleurs, l’ensemble des combustibles URE usés qui ont été produits par EDF est compatible avec les concepts actuels d’entreposage à sec. Ceci représente environ 1 150 assemblages.

 

En conclusion, l'analyse de I'IRSN ne fait pas apparaître d'éléments rédhibitoires à l’entreposage à sec d’une partie des combustibles usés MOX et URE d’EDF actuellement entreposés sous eau. Elle illustre en outre que des évolutions de concepts d’entreposage à sec pourraient permettre d’accueillir des combustibles usés de puissance thermique significativement supérieure à 2 kW. Il conviendrait toutefois d'examiner les options possibles, en intégrant l’ensemble des exigences de sureté́ et de radioprotection afférentes ainsi que les contraintes industrielles.

 

A écouter : le décryptage d'Igor Le Bars, adjoint au directeur de l’expertise de sûreté de l’IRSN