Accident nucléaire de Tchernobyl : sûreté des installations du site en 2021

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21/04/2021

 

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Rappel des faits et état général des réacteurs de la centrale de Tchernobyl

Il y a trente-cinq ans, le 26 avril 1986 à 1h23 du matin, le réacteur n°4 de type RBMK de la centrale nucléaire de Tchernobyl, en Ukraine, a explosé accidentellement lors de la réalisation d’un essai technique. L’accident a conduit à la destruction complète du réacteur n°4 entraînant un incendie qui n’a pu être maîtrisé qu’en déversant dans le réacteur éventré une quantité importante de matériaux divers, soit environ 17 000 tonnes. L’accident du réacteur n°4 de la centrale de Tchernobyl a été classé au niveau 7 de l’échelle INES [1] . Cet accident a eu de lourdes conséquences tant sur la santé des populations alentours que sur l’état radiologique de l’environnement.

 

Le réacteur n°4 a été confiné en urgence dans un sarcophage (Object Shelter : OS) provisoire. Les incertitudes sur la tenue structurelle de ce sarcophage au-delà d’une durée d’environ 40 ans a conduit l’exploitant de la centrale de Tchernobyl, avec l’aide financière et technique de la communauté internationale, à construire une arche de confinement (New Safe Confinement : NSC) afin de protéger l’environnement et de permettre le démantèlement du sarcophage. Construite sur une aire extérieure à distance du réacteur, les travaux de construction de l’arche ont débuté en 2008 et se sont achevés en 2017 avec la mise place de l’Arche.

 

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Les réacteurs RBMK sont des réacteurs à neutrons thermiques utilisant le graphite comme modérateur et l'eau légère bouillante comme fluide caloporteur. Le combustible est de l'oxyde d'uranium enrichi en uranium 235. 

 

Les trois autres réacteurs RBMK n°1, 2 et 3 construits sur le site de la centrale de Tchernobyl ont continué à être exploités jusqu’en décembre 2000, date à laquelle le dernier réacteur en fonctionnement, le réacteur n°3, a été arrêté définitivement. Le démantèlement de ces trois réacteurs est en cours.

 

La zone d’exclusion de Tchernobyl (30 km autour du réacteur n°4) est gérée par la « State Agency of Ukraine on Exclusion zone management » (SAUEZM) dont dépend SSE ChNPP, l’exploitant de la Centrale de Tchernobyl (« State Specialized Enterprise “Chernobyl NPP) qui a en charge le démantèlement des réacteurs ainsi que la gestion des déchets et des combustibles usés du site de la Centrale et la CRME (State Specialized Entreprise – Centralized Radioactive Waste Management Entreprise) qui a en charge la gestion des déchets de la zone d’exclusion autour du site de la Centrale.

 

Compte tenu de la situation particulière du site de la centrale de Tchernobyl, la stratégie globale élaborée par SSE ChNPP pour le démantèlement du site privilégie un démantèlement différé de l’ensemble des réacteurs d’ici à 2050. Cette stratégie conduit à une exploitation de l’Arche du réacteur n°4 pour une durée de 100 ans (2017-2117). 

 

Stratégie de démantèlement des réacteurs de la centrale de Tchernobyl

Stratégie de démantèlement du réacteur n°4

Les dimensions de l’Arche (NSC) sont de 257 m en largeur et 162 m de longueur, pour une hauteur de 109 m (36 000 tonnes). En juillet 2020, SSE ChNPP a obtenu l'autorisation de mise en service afin de s’assurer notamment du bon fonctionnement de ses équipements (ventilation, ponts de manutention). L’étape suivante, qui sera très délicate à réaliser, consistera à démanteler les structures instables du sarcophage (OS). Cette étape est prévue de s’achever fin 2023. Elle sera suivie d’une période d’attente durant laquelle des études complémentaires de sûreté portant sur la faisabilité et la préparation de la reprise du corium et des fragments de combustibles (Fuel Containing Material : FCM) seront réalisées. Durant cette période, une solution de stockage définitif pour les déchets produits par ces travaux sera recherchée. L’objectif de l’exploitant SSE ChNPP est de débuter les opérations de reprise des FCM d’ici à 2050. L’exploitant estime que ces opérations y compris le conditionnement des FCM en colis pour un stockage ultime dureront 40 ans. L’état final visé prévoit le démantèlement de l’Arche une fois que l’ensemble des structures restantes du réacteur n°4 auront été assainies.

 

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Stratégie de démantèlement des réacteurs n°1 à 3

La stratégie de démantèlement élaborée par SSE ChNPP pour les réacteurs n°1, 2 et 3 a été approuvée par l’Autorité de Sûreté Ukrainienne en 2008. Les étapes du démantèlement des réacteurs n°1 à 3 prévoient un démantèlement partiel (retrait des tubes guides activés, reconstruction des toits des réacteurs et démantèlement des ponts de manutention et des machines de chargement/déchargement des assemblages combustibles), la mise sous surveillance pour un peu moins de 20 ans, puis le démantèlement des réacteurs à partir de 2045. Les travaux devraient s’achever en 2064, après un l’assainissement des structures de génie civil des trois réacteurs.

 

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L’état final du site de la centrale de Tchernobyl

Compte tenu des incertitudes existantes sur le démantèlement du réacteur n°4, un usage ultérieur industriel du site est privilégié.

 

Gestion des combustibles usés de la centrale de Tchernobyl

Entreposage sous eau centralisé : ISF-1

Au cours du fonctionnement des réacteurs de 1977 à 2000, la centrale nucléaire de Tchernobyl a utilisé 21 284 assemblages combustibles. Depuis fin 2016, tous ces assemblages combustibles sont entreposés dans une piscine d’entreposage centralisée (ISF-1). La piscine ISF-1 a été mise en service en 1986. Cette installation n'est pas conçue pour l’entreposage à long terme du combustible usé et son exploitation est envisagée jusqu’en 2028. Tous les assemblages de combustible usés seront transférés dans une nouvelle installation d’entreposage à sec (ISF-2).

 

Entreposage à sec : ISF-2

L’ISF-2 a été conçue pour une durée de 100 ans et se compose de 2 parties ; une installation pour le conditionnement des assemblages combustibles usés et une zone d’entreposage constituée de modules d’entreposage horizontaux en béton. L'installation est conçue pour assurer le conditionnement de 2 500 assemblages combustibles par an. Le 18 novembre 2020, lors des essais « en actif » de l’installation ISF-2, le premier colis chargé d’assemblages combustibles usés a été inséré dans un des modules en béton de la zone d’entreposage de l’installation. Le 14 décembre 2020, la phase active des essais à chaud s'est achevée. L’autorisation d’exploiter l'ISF-2 devrait être délivrée par l’Autorité de Sûreté Ukrainienne en avril 2021.

 

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Gestion des déchets produits par les activités conduites sur le site de la centrale de Tchernobyl

Les déchets produits par les activités réalisées sur le site de la centrale de Tchernobyl sont classés en deux types :

  • les déchets produits par l’exploitation normale des installations du site ;
  • ​les déchets induits par l’accident de 1986, y compris ceux provenant du sarcophage (OS).

 

L’exploitant de la centrale de Tchernobyl estime que le volume de déchets radioactifs provenant des opérations de démantèlement des quatre réacteurs sera de l’ordre de 177 255 m3. La part des déchets radioactifs liquides est estimée à 36 148 m3 et celle des déchets solides à 141 107 m3 [4] . Actuellement, 22 645 m3 de déchets solides et liquides sont entreposés sur le site de la centrale dont la majeure partie est constituée de déchets liquides (20 133 m3) nécessitant un traitement ultérieur (Cf. LRTP, ci-après).

 

Traitement des déchets solides et liquides produits sur le site de la centrale

  • ​Gestion des déchets solides : une installation de gestion des déchets solides (Industrial Complex for Solid Radioactive Waste Management – ICSRM) a été construite entre 2001 et 2009 pour traiter l’ensemble des déchets solides du site de Tchernobyl. Cette installation a été conçue pour traiter 3 500 m3 de déchets solides pas an. Après conditionnement et entreposage sur site, les colis de déchets produits seront transférés vers l’installation de stockage de surface située sur le site de Buryakovka, dans la zone d’exclusion de Tchernobyl. L’ICSRM est composé de divers sous-ensembles (tri, conditionnement, entreposage) dont l’ensemble devrait être mis en service au cours de l’année 2021, pour une durée de 30 ans.
     
  • ​Gestion des déchets liquides : les déchets radioactifs liquides seront traités par un procédé de cimentation dans l’installation de gestion des déchets liquides (LRTP) pour être conditionnés dans des fûts en acier de 200 litres. Cette installation est conçue pour traiter 2 500 m3 de déchets liquides par an. Les fûts de 200 l sont conditionnés par quatre dans un container en béton armé qui est ensuite entreposé avant d’être transféré vers une installation de stockage de surface située sur le site industriel Vector. Le LRTP a été mis en service en 2014 et a traité jusqu’à aujourd’hui seulement 3,4 m3 de déchets liquides générant 40 colis de déchets solides.

 

Entreposage et stockage des déchets radioactifs produits par la centrale de Tchernobyl

Les installations d’entreposage existantes sur le site de la centrale devraient être saturées d’ici deux à trois ans. Une installation d’entreposage est en cours de création dans la salle des machines au niveau du réacteur n°1 pour y entreposer en particulier 16 000 m3 de déchets conditionnés en fûts de 200 litres (3200 colis).

 

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Notes :

  1. INES : International Nuclear Event Scale / Échelle internationale des évènements nucléaires
  2. https://inis.iaea.org/collection/NCLCollectionStore/_Public/48/047/48047388.pdf​ 
  3. The first case with spent nuclear fuel is placed in the storage of spent nuclear fuel «dry» type – ISF-2 (dazv.gov.ua)
  4. https://chnpp.gov.ua/en/activity/radioactive-material-management/radioactive-waste-management 

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