Savoir et comprendre

Résumé

L'impact environnemental et sanitaire des anciens sites miniers du Limousin

21/05/2012

Source : Magazine Repères n°2, Mai 2009

Débat sur les anciens sites miniers du Limousin. De gauche à droite: François Rollinger, Antoine Gatet, Anne-Christine Servant-Perrier ©IRSN L’impact environnemental de l’extraction d’uranium fait l’objet d’une attention particulière au sein du Groupe d’expertise pluraliste (Gep) sur les sites miniers d’uranium du Limousin. Une démarche qui prend souvent la forme d’un débat animé entre experts de diverses origines, dont ceux d’associations locales.

Un représentant d'une association locale - Antoine Gatet, juriste de l'association Sources et rivières du Limousin - et deux experts de l'IRSN - Anne-Christine Servant-Perrier, spécialiste de l'analyse des risques liés à la géosphère, et François Rollinger, responsable de la division ouverture à la société - confrontent leurs opinions.  

 

L’impact environnemental de l’extraction minière d’uranium en Limousin fait-il l’objet d’un suivi suffisant ?

Antoine Gatet : Dans le langage de l’IRSN, la protection de l’environnement se réduit aux questions sanitaires. Il faut aussi prendre en compte la gestion des espaces naturels, en se penchant notamment sur les conséquences écologiques globales des pollutions radioactives. Notre objectif est de faire évoluer des pratiques d’experts nationaux du domaine du nucléaire, comme ceux de l’IRSN. Mais pas seulement, puisque que ceux qui, au sein du Groupe d’expertise pluraliste (Gep), n’appartiennent pas à l’IRSN, sont souvent issus eux-mêmes directement de cette institution, ou du domaine très fermé de l’expertise nucléaire…

François Rollinger : L’importance du suivi environnemental a été longtemps sous-estimée. Mais l’IRSN travaille sur cette question depuis une quinzaine d’années. C’est d’ailleurs sur proposition de l’IRSN qu’a été créé le Gep ! Pour nous, l’objectif est de quitter notre “bulle d’experts nationaux” pour mieux intégrer des problématiques locales et environnementales. Et ceci grâce à la diversité de la composition du Gep.

Anne-Christine Servant-Perrier : Dans le cadre du Gep, nous avons proposé des méthodes innovantes pour évaluer l’impact environnemental chimique ou radiologique des anciens sites miniers au-delà du seul impact sanitaire sur l’homme. Mais la prise en compte de l’environnement était déjà une réalité à l’IRSN, et les experts avaient anticipé des demandes et des préoccupations telles que celles de Sources et Rivières du Limousin.

 

Alors pourquoi l’association Sources et Rivières du Limousin a-t-elle quitté le Gep en 2007, avant de le réintégrer ?

A. G. : En intégrant le Gep, nous avions exigé que ses travaux soient relayés au niveau local par une instance de concertation, en l’occurrence une Clis (Commission locale d’information et de surveillance). Au bout d’un an et demi, elle n’avait toujours pas vu le jour, d’où notre départ. Nous sommes revenus après la création de la Clis chargée du suivi des anciens sites miniers uranifères de Haute-Vienne, en décembre 2007. Mais force est de constater qu’aujourd’hui encore, les travaux du Gep sont très peu visibles sur le terrain...

F. R. : L’ancrage local est effectivement essentiel et il y a encore des progrès à accomplir. Une association comme la vôtre peut y contribuer en faisant connaître les travaux du Gep et en portant les questionnements en son sein.

 

Que peut apporter une association comme Sources et Rivières du Limousin aux débats du Gep ?

A. G. : L’association ne se positionne pas uniquement sur des problématiques locales. Notre rattachement au réseau France Nature Environnement donne une dimension nationale à l’intégration de ces enjeux environnementaux. Nous déplorons en effet l’existence d’une “exception radioactive”, qui fait sortir les activités liées au nucléaire du champ de la législation française concernant la protection de l’environnement, et donc in fi ne organise leur irresponsabilité en la matière. La forme “pluraliste” du Gep est censée marquer une révolution de l’expertise dans le domaine nucléaire. Pour nous, ce n’est qu’une étape tardive de l’ouverture d’institutions comme l’IRSN à l’expertise tierce et interdisciplinaire. Nous sommes présents dans ce Gep notamment pour démontrer que l’IRSN a tout à gagner à s’élargir à d’autres compétences (juridiques, sociologiques, économiques, etc), et à intégrer les préoccupations de la société civile dont l’expertise est tout aussi légitime.

A-C. S. : Je pense que votre position d’acteur local ne consiste pas seulement à relayer au niveau national les problèmes environnementaux locaux. Vous pouvez faire remonter les enjeux tels qu’ils sont perçus par les populations. Il n’est pas anodin pour nous de savoir si la question que les gens se posent est : “Est-ce que vivre à côté des anciennes mines représente un danger pour moi ?” ou si elle consiste à se demander si la rainette dorée va souffrir de la présence des mines. Sur ce point vous êtes en mesure de transmettre au Gep des observations utiles auxquelles vous avez plus facilement accès.

F. R. : Le public veut disposer des informations pour se faire sa propre opinion. C’est dans ce but que l’IRSN a créé la base de données Mimausa sur les sites miniers d’uranium. Et c’est la diversité des points de vue qui permet de progresser ensemble.