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N° 3, Janvier-Mars 2011 | |||||||||||||
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Les
équipes de l'IRSN jugées très favorablement par l'Aeres
« Très bon niveau scientifique » ; « bien organisées » ; avis variant de « globalement positif » jusqu'à « extrêmement positif » : telles sont les appréciations récemment formulées par l'Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (Aeres) à propos des recherches que conduit l'Institut au service de l'expertise sur les risques nucléaires. Cet avis extérieur et indépendant souligne que la qualité du travail des chercheurs de l'IRSN n'a rien à envier à la qualité de celui des laboratoires académiques. Le résultat n'est pas le fruit d'un heureux hasard : il résulte de l'effort continu d'auto-analyse et de remise en question de notre recherche via l'évaluation interne. Cet effort se trouve aujourd'hui relayé par les recommandations plus détaillées des experts mandatés par l'Aeres, dont certaines méritent une attention particulière : clarifier des stratégies scientifiques mettant en perspective les enjeux et les priorités ; organiser des stratégies partenariales rationalisées avec le monde académique ; stimuler une animation scientifique plus ouverte ; mobiliser les atouts pour un rayonnement plus affirmé. Au-delà des autres recommandations plus ponctuelles, comme celle d'augmenter le nombre d'HDR, ce sont les axes d'excellence sur lesquels l'Institut va mobiliser ses chercheurs dans les années à venir. | ||||||||||||
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Géosciences
Séisme
chilien de 2010 :
les tensions tectoniques se sont relâchées Les mesures des
changements du niveau des terres provoqués par le séisme chilien du 27
février 2010 indiquent que les tensions tectoniques se sont relâchées dans
cette région.
Après le tremblement de terre chilien de magnitude 8,8 survenu le 27 février 2010, le CNRS a fait appel à un expert des séismes de l'IRSN, qui avait déjà travaillé au Chili quatre ans plus tôt, pour mesurer les déplacements verticaux subis par les sols. Sur un segment de 500 kilomètres identifié comme la longueur maximale de la rupture cosismiqueGLO, cet expert et ses collègues ont montré que les déplacements du sol varient entre -1 mètre et 2,5 mètres. Un axe situé à 120 kilomètres de la faille sépare les zones qui se sont surélevées de celles qui se sont affaissées. Observations et mesures sur le terrain Pour obtenir ces résultats, les chercheurs ont observé 24 sites le long des côtes du Pacifique et neuf vallées d'estuaire. Dans cette zone soumise aux marées, des encroûtements d'algues coralliennes roses indiquent habituellement la limite supérieure du niveau de ces mêmes marées. Ces encroûtements, désormais blanchis et situés au-dessus de cette limite à la suite du séisme, montrent que les algues ont été soulevées au-dessus de leur milieu de vie habituel, entraînant leur mort. Ces observations permettent ainsi d'estimer le soulèvement vertical du sol associé au séisme. De manière similaire, la végétation et les marqueurs anthropiques submergés (constructions, pontons sous l'eau, etc.) permettent d'apprécier l'affaissement des terrains. L'ensemble des mesures ainsi effectuées sont cohérentes avec les résultats préliminaires obtenus par GPS. Dislocation élastique Les données relevées ont été comparées à un modèle de dislocation élastique simple, qui représente le tremblement de terre comme le glissement uniforme d'une faille rectangulaire – en réalité, le glissement est sans doute variable le long de la faille. En utilisant les caractéristiques du séisme (quantité de glissement, géométrie de la faille), le modèle utilisé reproduit les observations. Ceci conforte l'hypothèse du modèle qui considère que le séisme se produit essentiellement par relâchement élastique de contrainte. La modélisation de la faille montre que celle-ci aurait glissé sur environ 10 mètres. Ce dernier chiffre, légèrement inférieur à celui de 11,9 mètres attendu dans le cas où les plaques Nazca et sud-américaine sont totalement coupléesGLO et convergeant de 6,8 centimètres par an, suggère que les tensions accumulées de par leur subductionGLO depuis le séisme de 1835 se sont bien élastiquement relâchées le 27 février. Ces travaux ont été réalisés en collaboration avec le Departamento de Geología, Université du Chili ; le Departamento de Ciencias de la Tierra ; l'Université de Concepción, Chili ; l'IRD, LMTG, UPS (OMP), Université de Toulouse, France ; et l'Institut für Erd- und Umweltwissenschaften, Université de Potsdam, Allemagne. Dosimétrie
externe
Des
améliorations dans l'estimation des doses reçues par les irradiés
Dans le cadre de sa
thèse soutenue le 4 octobre 2010, Estelle Courageot a étendu les
possibilités de l'outil Sesame, utilisé pour évaluer les doses reçues par
les victimes d'irradiations externes.
Pour la prise en charge médicale des victimes d'irradiations externes, il est nécessaire de connaître avec précision la distribution dans l'organisme de la doseGLO de radiations reçue par les tissus et les organes. C'est l'objet de l'outil Sesame (Simulation of external source accident with medical images) développé depuis une dizaine d'années au Laboratoire de dosimétrie des rayonnements ionisants. Estelle Courageot a élaboré dans l'outil Sesame de nouvelles fonctionnalités qui permettent en particulier de prendre en compte la posture réelle de la victime lors de l'accident. Des fantômes numériques flexibles À l'aide d'un code de calcul Monte Carlo qui simule les trajectoires des particules issues de la source et leur interaction avec la matière, Sesame calcule la distribution de la dose dans un fantôme numérique, c'est-à-dire une représentation virtuelle du corps de la victime. Jusqu'à présent, ces fantômes anthropomorphes ne pouvaient apparaître que couchés ou debout, car ils sont conçus à partir des scanners des victimes en position allongée, ce qui n'est pas forcément représentatif de leurs positions réelles lors de l'accident. Afin d'améliorer l'estimation de la distribution de la dose, E. Courageot a développé un outil pour créer des fantômes dont la posture peut être ajustée en utilisant un format intermédiaire dit NURBS (Non-Uniform Rational B-Spline). Pour cela, des contours du corps de la victime sont extraits des coupes scanners grâce à un logiciel de planification de traitement utilisé en radiothérapie ; puis ils sont superposés pour constituer un volume représentant le corps. Un logiciel de conception assistée permet de créer, à partir des contours, des fantômes au format NURBS facilement déformables. La dernière étape consiste à voxéliser, c'est-à-dire à numériser en trois dimensions, le fantôme NURBS dans l'outil Sesame. S'ouvrir à la radiothérapie L'outil Sesame ne fonctionne pour l'instant qu'avec des modèles de sources scelléesGLO ; il ne permet donc pas de reconstituer des accidents survenant en radiothérapie externe où la source se présente sous la forme d'un faisceau de particules. Mais E. Courageot a démontré la faisabilité d'une fonctionnalité dédiée à la reconstitution d'accidents de radiothérapie externe. Dans le cas où le faisceau de rayonnement est de forme simple (parallélépipèdes), elle a défini les paramètres nécessaires pour que l'outil Sésame fournisse la distribution de la dose en des temps de calculs raisonnables pour prendre en charge la victime tout en conservant une précision suffisante. Un résultat qui ouvre de nouvelles perspectives à l'outil Sesame. Dosimétrie
interne
Un
outil pour optimiser la surveillance de la contamination interne en milieu
professionnel
Dans le cadre de sa
thèse soutenue le 14 septembre 2010, Estelle Davesne a développé un
système expert qui permet, en tenant compte des incertitudes, d'optimiser
les procédures de surveillance de la contamination interne pour les
travailleurs du nucléaire.
Afin de contrôler l'exposition des travailleurs aux rayonnements ionisants, les exploitants de l'industrie nucléaire mettent notamment en place, à l'aide de normes Iso, des programmes de surveillance de la contamination interne. Ces programmes reposent sur des mesures radiotoxicologiquesGLO et anthroporadiamétriquesGLO régulières, à partir desquelles la dose de rayonnements reçue est ensuite évaluée grâce à des modèles biocinétiquesGLO. Ces normes sont très génériques, et l'imprécision des modèles, conjuguée à la variabilité des mesures, induit des incertitudes. Les travaux d'Estelle Davesne ont eu pour but de quantifier ces incertitudes intrinsèques et de mettre au point une méthode pour optimiser ces programmes de surveillance compte tenu des incertitudes, c'est-à-dire pour identifier ceux dont la technique de mesure et la fréquence de surveillance réalisent le meilleur compromis entre leur coût et leur sensibilité. Cette méthode repose sur l'évaluation de la dose minimale détectable (DMD), c'est-à-dire la plus petite dose que le programme de surveillance peut détecter. Elle est utilisée comme un critère de sensibilité du programme de surveillance en termes de dose : si la mesure ne décèle aucune activité (« mesure négative »), alors la dose, s'il y a réellement contamination, est inférieure à la DMD avec un niveau de confiance de 95 %. Propagation des incertitudes L'innovation de la thèse consiste à réaliser le calcul de la DMD en utilisant des techniques mathématiques statistiques pour prendre en compte les incertitudes relatives à la mesure et aux conditions d'exposition. À partir d'un ensemble de mesures négatives, Estelle Davesne a propagé ces incertitudes par trois méthodes statistiques distinctes pour obtenir les incertitudes sur l'incorporation et sur la dose : classique (propagation directe des incertitudes des causes vers les conséquences) et bayésiennes (propagation indirecte des conséquences vers les causes) avec des variables continues ou discrètes (réseau bayésien). Ces techniques utilisent les modèles biocinétiques pour calculer la dose, ce qui permet d'obtenir une distribution de valeurs de dose. E. Davesne a alors appliqué la définition de la DMD : 95 % de ces valeurs sont inférieures à la DMD, ce qui donne la valeur de cette dernière. Optimiser la surveillance Les résultats obtenus ont permis à E. Davesne de développer et de valider le système expert Opsci (Optimisation des programmes de surveillance de la contamination interne) qui calcule la DMD en intégrant les incertitudes sur l'exposition et sur la mesure d'activité. Ce nouvel outil est d'ores et déjà utilisé par l'IRSN et par Areva-La Hague. Accidents
de fusion du cœur - Physique/chimie
Modélisation
de la fissuration d'une cuve de réacteur en cas d'accident de fusion de
cœur
À partir d'un
dispositif expérimental novateur, la thèse soutenue par Nicolas Tardif le
10 décembre 2009 modélise l'initiation et la propagation d'une fissure
dans la cuve en acier d'un réacteur, qui peut survenir lors d'un accident
de fusion du cœur.
En cas d'accident de fusion du cœur d'un réacteur à eau sous pression et coulée du cœur en fusion au fond de la cuve, le poids et la chaleur dégagée par les matériaux induisent une déformation par fluage du fond de la cuve. Il est alors primordial de prévoir si celle-ci va se fissurer et si oui, comment. La position et la taille finale de la brèche sont en effet déterminantes pour estimer les conséquences de l'accident. Dans le cadre de sa thèse, Nicolas Tardif a modélisé l'initiation et la propagation d'une fissure dans une cuve en acier, en fonction de la dépressurisation de cette dernière à la suite de la fissuration, et ceci pour deux nuances d'acier 16MND5 et dans des conditions représentatives d'un accident : hautes températures (900°C ou 1000°C) et fortes vitesses de déformation (vitesse de déformation vraie de 1 à 50 s−1). Un ordre de grandeur a été établi pour les vitesses de propagation de fissure, pour l'évolution de la dépressurisation et pour celle de l'aire fissurée en fonction du temps. L'étude a également montré que l'initiation de la fissure est d'autant plus précoce et sa propagation d'autant plus rapide que la température est élevée. En revanche, la nuance de l'acier ne semble pas avoir d'impact. Dispositif expérimental Pour étudier le couplage entre la fissuration et la dépressurisation dans les conditions thermomécaniques représentatives d'un accident, un dispositif expérimental inédit a été conçu. Il s'agit d'un tube d'une trentaine de centimètres, que l'on étire et pressurise à l'intérieur. Le volume de gaz a été défini pour que le rapport entre l'énergie mécanique disponible (PV) et l'énergie nécessaire à la rupture complète de la structure soit le même pour les essais que pour une cuve. Il est filmé par deux caméras numériques rapides, dont une caméra infrarouge, pendant la montée en température jusqu'à la rupture. Un modèle numérique Les données recueillies expérimentalement ont été comparées à des simulations numériques fondées sur une loi existante rendant compte des phénomènes de traction et de séparation, loi que N. Tardif a adaptée aux caractéristiques viscoplastiques du matériau étudié. Utilisant la méthode des éléments finis, ces simulations modélisent l'initiation et la propagation de la fissure par une zone cohésive qui décrit deux surfaces initialement coïncidentes et qui finissent par se séparer jusqu'à décohésion totale. On simule ainsi les lèvres de la fissure et donc l'initiation et la propagation de cette dernière dans un milieu hautement ductile. Les résultats obtenus serviront de base pour identifier une loi de comportement (de traction et de séparation) propre aux conditions d'un accident de fusion du cœur, capable de rendre compte des mécanismes d'endommagement localisés, et valide sur une gamme de vitesses de déformation étendue. | ||||||||||||
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Aktis
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