Savoir et comprendre

La mortalité due à l'accident

21/05/2012

​​​​(Mise à jour) Pour un bilan actualisé en 2021, lire notre dossier « Tchernobyl, 35 ans ​après »​​
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Dès le mois de mai 1986, la question a été posée du nombre de décès imputables à l’accident de Tchernobyl. Les nombres avancés se sont échelonnés de quelques mille à quelques centaines de mille, sans que soient apportées de justifications convaincantes.

Ils relèvent de l’évaluation prévisionnelle - sur quelques 70 ans... Ce sont des concepts qu’on ne pourra probablement jamais vérifier par une statistique et dont l’intérêt reste discutable.

 

Les décès par irradiation aigue

Les personnels de la centrale présents sur le site et les équipes d’urgence qui sont intervenues lors de l’accident ont reçu de fortes doses. Une trentaine de personnes, victimes d’effets aigus, sont décédées dans les quatre mois après l’accident et une vingtaine d’autres dans les quatre années suivantes [1].

 

Les décès par cancers 

Il s’agit des principaux effets à long terme. Ils apparaissent plusieurs années ou dizaines d’années après l’exposition chez une partie des personnes exposées.

Pour mesurer le nombre de décès par cancers survenus ou à venir parmi les personnes exposées aux retombées de l’accident de Tchernobyl, il faudrait suivre l’ensemble de ces personnes durant leur vie entière, ce qui impliquerait de suivre individuellement plusieurs millions de personnes.

Cela est pratiquement irréalisable, notamment pour des raisons de coût. Même avec un tel suivi, il serait difficile de considérer que l’exposition aux rayonnements ionisants est seule responsable d’un décès par cancer, les cancers étant des maladies pour lesquelles de multiples facteurs individuels et environnementaux interviennent.

 

La prédiction des décès par cancers

Les seules indications possibles viennent donc d’estimations de ce que pourraient être ces décès. Celles-ci sont basées sur :

  • le nombre de personnes exposées,
  • leur niveau d’exposition,
  • la relation dose-effet (provenant d’études épidémiologiques autres que celles concernant Tchernobyl). Pour calculer les effets aux faibles doses, l’hypothèse retenue est celle d’une proportionnalité entre les effets et les doses (loi linéaire sans seuil) extrapolée à partir des doses moyennes et fortes (notamment les cohortes de survivants d’Hiroshima et Nagasaki).

 

Dispersion des prédictions

Pour l’accident de Tchernobyl, ces prédictions de décès par cancer sur la vie entière des personnes exposées sont très dispersées :

  • Selon Anspaugh et al. (2000), les retombées de l’accident de Tchernobyl pourraient être responsables de 2 000 à 17 000 décès par cancer sur la vie entière, parmi les habitants de l’ex-URSS.
  • Lors de la récente conférence internationale sur les conséquences sanitaires et environnementales de l’accident de Tchernobyl en Belarus, Russie et Ukraine, organisée par l’AIEA en septembre 2005, les experts de l’OMS ont avancé le nombre de 4000 décès à venir au sein des liquidateurs, des personnes évacuées et des résidents des zones contaminées strictement contrôlées et un nombre du même ordre de grandeur au sein des 5 à 6 millions de personnes non évacuées vivant dans les zones contaminées à plus de 37 kBq par m².

De façon générale, la prédiction du nombre de décès imputables aux doses reçues est entachée de grandes incertitudes. Certains experts jugent que les doses sont sous-évaluées ; d’autres pensent que les populations sont incomplètes, les perdus de vue étant nombreux à cause des flux migratoires ; d’autres n’appliquent pas la relation linéaire sans seuil aux très faibles doses ; d’autres encore considèrent que les expositions sont de nature chronique et non aigue et donc que les coefficients de risque ne sont pas adaptés ; d’autres enfin estiment que le fait d’avoir été victime de l’accident de Tchernobyl est en soi suffisant pour être la cause des décès observés.

Ces points de vue expliquent les critiques et les contestations qui s’expriment à propos de la mortalité due à Tchernobyl.