Nouvelles détections de fissures sur des tuyauteries du système d’injection de sécurité des réacteurs n° 1 et n° 2 de la centrale nucléaire de Penly et n° 3 de Cattenom

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16/03/2023

Pendant les arrêts en cours pour maintenance des réacteurs n° 1 et 2 de Penly et n° 3 de Cattenom, EDF a détecté de nouvelles fissures sur les circuits d’injection de sécurité de ces réacteurs.

Le circuit d’injection de sécurité est un système de sauvegarde qui injecte de l’eau borée dans le circuit primaire principal du réacteur pour refroidir le cœur en cas de brèche sur le circuit primaire. L’objectif est ainsi de maintenir un inventaire en eau suffisant dans le cœur afin de refroidir le combustible.

Le système RIS est composé de deux voies indépendantes connectées au circuit primaire via des piquages en branche chaude [1] et en branche froide [2] sur les boucles du circuit primaire (circuit principal de refroidissement du cœur du réacteur). Il existe 4 piquages en branche froide et 2 piquages en branche chaude.

 
Note d'info Fissures Figure 1 connexion
Figure 1 : Connexion du système d’injection de sécurité à la branche froide d’une boucle du circuit primaire principal
Note d'info Fissures Figure 2 connexion
Figure 2 : Connexion du système d’injection de sécurité à la branche chaude d’une boucle du circuit primaire principal

A l’occasion d’un arrêt du réacteur n°1 de Civaux, débuté en août 2021, EDF a détecté des fissures de corrosion sous contrainte1 affectant une tuyauterie du système d’injection de sécurité de ce réacteur. Ce type de corrosion2 n’était pas anticipé pour ces tuyauteries, les contrôles alors réalisés visant à rechercher d’éventuelles fissures de fatigue (voir plus bas). Depuis, il a procédé à des contrôles sur de nombreux réacteurs et d’autres circuits qui ont mis également en évidence ce phénomène. Ces défauts sont dus, selon EDF, à des contraintes mécaniques dans certaines portions de circuits, non prévues à la conception et résultant d’effets de stratification thermique (différence importante de température entre le fluide présent en partie basse et haute de la tuyauterie, comme illustré en figure 1). Ces défauts ont été détectés sur les tuyauteries du circuit d’injection de sécurité connectées aux branches froides du circuit primaire du réacteur.
Récemment, sur un circuit d’injection de sécurité connecté à une branche chaude du circuit primaire du réacteur n° 1 de Penly, EDF a détecté une fissure de 155 mm de long et d’une profondeur maximale de 23 mm, valeur proche de l’épaisseur totale de la tuyauterie (27 mm). Cette fissure est située (cf. figure 2) dans une zone qui n’est pas susceptible de présenter une stratification thermique. Toutefois, au moment de la construction du réacteur, cette soudure avait été réparée à deux reprises, une première fois pour corriger un défaut d’alignement des tronçons du circuit, une seconde fois pour corriger un défaut de soudure. Cette particularité pourrait expliquer la présence d’une fissure de corrosion sous contrainte aussi profonde.

De plus, à l’occasion de contrôles visant à détecter d’éventuelles fissures de corrosion sous contrainte, deux fissures de fatigue thermique ont été découvertes, l’une de 57 mm de long pour 12 mm de profondeur affectant le réacteur n° 2 de Penly (cf. figure 1), l’autre de 165 mm de long pour 4 mm de profondeur affectant le réacteur n° 3 de Cattenom.

La fatigue thermique est un mode d’endommagement d’un matériau métallique résultant de variations de température répétitives, pouvant conduire à l’apparition et à la propagation de fissures. C’est un mode d’endommagement connu des circuits des réacteurs nucléaires. Par exemple, il a conduit à une fuite sur un circuit de refroidissement du réacteur n° 1 de Civaux en 1998, dès la phase de mise en service du réacteur, et à d’autres fissures sur des réacteurs de Dampierre dans les années 1990.

EDF a mis en place des contrôles périodiques pour détecter l’apparition de ce type de défaut et procéder aux réparations nécessaires. Le principal mode de prévention de la fatigue thermique est la conception des circuits ou les précautions prises en exploitation, afin d’éviter que les tuyauteries soient soumises à des variations cycliques de température. EDF a mis en place un programme de contrôle périodique des soudures en priorisant les plus susceptibles d’être soumises à la fatigue thermique, dans la mesure où il n’est pas possible de contrôler l’ensemble des soudures. Les soudures les plus sensibles, soumises aux contrôles, sont identifiées sur la base de calculs des conditions d’écoulement et de température dans les tuyauteries. Cependant, en ce qui concerne les réacteurs n° 2 de Penly et n° 3 de Cattenom, les fissures de fatigue n’ont pas été découvertes sur les soudures du programme de contrôle périodique, mais grâce aux contrôles supplémentaires visant à rechercher des défauts de corrosion sous contrainte.

La morphologie des fissures de fatigue, assez rectilignes, est très différente de celle des fissures de corrosion sous contrainte, moins régulières et parfois ramifiées. Par des analyses en laboratoire, elles sont aisées à distinguer.

En septembre 2021, c’est à l’occasion des contrôles périodiques visant à détecter d’éventuelles fissures de fatigue qu’EDF avait découvert des fissures de corrosion sous contrainte sur le réacteur n° 1 de Civaux.

Compte tenu de la détection de nouvelles fissures d’une part sur le réacteur n° 1 de Penly (corrosion sous contrainte « profonde » dans une zone non sensible à la stratification thermique) et d’autre part sur les réacteurs n° 2 de Penly et n° 3 de Cattenom (fatigue thermique), l’ASN a demandé à EDF de revoir sa stratégie de contrôle vis-à-vis de ces deux modes d’endommagement.

1 : Note d’information IRSN du 16 décembre 2021

2 : Note d’information IRSN du 20 janvier 2022

 

[1] Après la sortie de la cuve du réacteur

[2] Avant l’entrée de la cuve du réacteur