Savoir et comprendre

Constat radiologique de la zone littorale française méditerranéenne

03/03/2021

​Ce constat radiologique environnemental relatif à la zone littorale française méditerranéenne, vient actualiser et enrichir les connaissances relatives à l’état radiologique environnemental de cette zone géographique. Il présente et commente les activités des principaux radionucléides [1] naturels et artificiels mesurés dans les différentes composantes de ce milieu marin que sont les eaux, les sédiments, les coquillages et des denrées alimentaires marines.

 

En bref

 

Ce constat étudie les trois zones potentiellement influencées par les rejets actuels ou passés des installations nucléaires de la région : l’embouchure du Rhône et la frange côtière située à l’ouest de cette embouchure jusqu’à la frontière espagnole, influencée par les rejets des installations nucléaires rhodaniennes, la rade de Toulon influencée par la base militaire présente dans ce port et la zone lagunaire de l’étang de Bages, potentiellement influencée par les rejets liquides du site Orano de Malvési.


L’influence des rejets des installations nucléaires rhodaniennes est décelée à l’embouchure du fleuve : dans l’eau de mer avec des concentrations en tritium jusqu’à vingt fois supérieures à celles observées hors influence ainsi que dans les sédiments pour le cobalt-60 et les isotopes [2] du plutonium.

 

Le césium-137 apporté par le Rhône en Méditerranée, visible surtout à proximité ouest de l’embouchure du fleuve, provient principalement du drainage des sols contaminés par les retombées de l’accident de Tchernobyl et des essais atmosphériques d’armes nucléaires. Hors influence du Rhône, les activités de césium-137 les plus élevées mesurées dans des sédiments concernent la partie sud-orientale de la Corse où les retombées de l’accident de Tchernobyl ont été parmi les plus importantes du territoire français.

 

Les activités en tritium dans les sédiments très fins de la rade de Toulon peuvent y être jusqu’à cent fois plus élevées que celles qui sont observées ailleurs. Il est probable qu’elles soient en partie à l’origine des activités de tritium, également plus élevées qu’ailleurs, mesurées dans les moules et les poissons issus de la rade. Ce marquage ne permet cependant pas à lui seul d’expliquer les activités de tritium également élevées mesurées sporadiquement dans l’eau de la rade. Néanmoins, les conséquences de ces niveaux d’activité en tritium dans l’eau de mer sont négligeables pour les populations et l’environnement.

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Ce constat a pour objectif :

 

  • ​​​de préciser l’état radiologique des trois zones influencées par les principales installations nucléaires de la région située le long du Rhône et sur la frange côtière de mer Méditerranée 
  • ​​​​d’améliorer les connaissances sur le bruit de fond radiologique environnemental méditerranéen hors influence des rejets des installations nucléaires françaises et lié, d’une part à la radioactivité naturelle, d’autre part à la rémanence des retombées atmosphériques anciennes liées aux essais d’armes nucléaires et à l’accident de Tchernobyl 
  • ​​de disposer d’un état radiologique environnemental régional de référence permettant d’établir des comparaisons en cas d’anomalies ou de retombées radioactives accidentelles sur la frange littorale de la mer Méditerranée
  • Ces études viennent en complément de la surveillance régulière de la radioactivité dans l’environnement français, assurée à proximité des installations nucléaires par l’IRSN et dont les résultats sont centralisés sur le site internet du Réseau national de mesures de la radioactivité de l’environnement (RNM : www.mesure-radioactivite.fr). Elle représente annuellement environ 5000 échantillons prélevés et traités et plus de 7000 résultats de mesures.

 

Que faut-il retenir ?

 

  • ​L’ensemble des données issues de la surveillance, ainsi que celles des campagnes d’études spécifiques permettent de dresser un état radiologique actualisé de l’environnement marin sur la zone littorale française méditerranéenne. Les activités massiques et volumiques des principaux radionucléides naturels et artificiels mesurés dans les différentes composantes du milieu marin que sont les eaux, les sédiments, les coquillages et les poissons sont présentées et commentées.
  • ​Concernant les radionucléides naturels, ce rapport s’est focalisé sur les isotopes de l’uranium et sur le polonium-210. Ce dernier a la particularité de se concentrer dans certaines denrées marines, notamment dans les coquillages, contribuant ainsi de façon très majoritaire à la dose par ingestion de radionucléides naturels reçue par les personnes qui en consomment très régulièrement. 
  • ​Les activités massiques de polonium-210 dans les moules présentées dans ce constat sont du même niveau que celles reportées dans la bibliographie internationale. Dépendantes de la nature géologique des côtes, elles sont plus élevées le long de la côte rocheuse cristalline [3] (littoral varois et Corse), et moindre le long de la côte sableuse et calcaire du littoral occidental.

 

Les activités des isotopes de l’uranium mesurées dans les moules de Méditerranée sont caractéristiques de l’uranium naturel. Par ailleurs, les teneurs en uranium de l’échantillon de moule prélevé dans l’étang de Bages, potentiellement influencé via les eaux du Tauran par les rejets de l’usine de Malvési située près de Narbonne, sont similaires à celles observées ailleurs.

Les activités de carbone-14 présentées dans ce rapport sont cohérentes avec celles mesurées sur la même période dans l’air et en milieu terrestre hors de l’influence d’une installation nucléaire ; elles montrent l’origine principalement naturelle de ce radionucléide en Méditerranée.

 

​​Concernant les radionucléides artificiels, l’influence des rejets des installations nucléaires rhodaniennes est décelée en mer à l’embouchure du fleuve pour le tritium (dans l’eau principalement), le cobalt-60 (dans les sédiments) et pour les isotopes du plutonium (dans les sédiments). Dans le cas du tritium, cette influence est perceptible sur tout le littoral situé à l’ouest de l’embouchure, bien qu’elle diminue avec la distance. Les activités de tritium dans l’eau de mer mesurées à l’embouchure sont jusqu’à vingt fois supérieures par rapport à celles observées hors influence ; celles mesurées à Banyuls ne sont plus que deux fois supérieures.

 

Cette influence diminue aussi très rapidement dès lors que l’on s’éloigne de quelques kilomètres au large de l’embouchure. Dans les sédiments marins situés à proximité de l’embouchure, le plutonium provenant des rejets de l’usine de Marcoule ne se distingue de celui provenant des retombées des essais nucléaires que par les rapports d’activités isotopiques. De même, depuis la baisse des rejets des installations nucléaires au cours des années 1990-2000, le césium-137 apporté par le Rhône en Méditerranée, mesurable surtout à proximité ouest de l’embouchure du fleuve, provient principalement du drainage des sols contaminés par les retombées de l’accident de Tchernobyl et des essais d’armes nucléaires. Hors influence du Rhône, les activités de césium-137 les plus élevées mesurées dans des sédiments concernent la partie sud-orientale de la Corse où les retombées de l’accident de Tchernobyl ont été parmi les plus importantes du territoire français.

 

La rade de Toulon présente de nombreuses spécificités. Dans ce milieu presque clos, les courants qui, ailleurs, dispersent les apports littoraux d’eau et de particules, notamment les plus fines, sont faibles, de même que les échanges avec la mer libre. Les sédiments y sont très fins, ce qui favorise la fixation des radionucléides, notamment ceux provenant du drainage des sols comme le césium 137 provenant principalement des retombées de l’accident de Tchernobyl et les isotopes du plutonium provenant des retombées des essais nucléaires. La principale particularité de la rade de Toulon concerne le tritium. Les activités de ce radionucléide dans les sédiments peuvent y être jusqu’à cent fois plus élevées que ce qui est observé ailleurs. L’origine de cette contamination n’est pas clairement établie, mais la profondeur des sédiments les plus marqués suggère qu’elle est ancienne. Cette contamination des sédiments est probablement en partie à l’origine des activités massiques de tritium, plus élevées qu’ailleurs, mesurées dans les moules et les poissons issus de la rade. Elle ne permet cependant pas à elle seule d’expliquer les activités de tritium également élevées mesurées sporadiquement dans l’eau de la rade. Néanmoins, les conséquences de ces niveaux d’activité en tritium dans l’eau de mer sont négligeables pour les populations et l’environnement.

[1] Radionucléide : Isotope radioactif d'un élément chimique

[2] Isotopes : Eléments chimiques dont les atomes possèdent le même nombre d'électrons et de protons, mais un nombre différent de neutrons. Ils ont le même nom, et les mêmes propriétés chimiques.​

[3] Une roche cristalline est toute roche composée entièrement de minéraux cristallisés sans matière vitreuse (matière vitreuse : matière non cristallisée telle que le verre).

 

En savoir plus sur le constat radiologique environnemental « Mer Méditerranée »

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En savoir plus 

Sur le constat radiologique environnemental « Rémanence de la radioactivité d’origine artificielle» : lconstat radiologique « Rémanence de la radioactivité d’origine artificielle »​mesure et analyse l’évolution des niveaux de radioactivité liés aux essais d’armes nucléaires entre 1950 et 1980 et à l’accident de Tchernobyl dans certaines zones du territoire français.

Sur le constat radiologique régional « Vallée du Rhône » 

Sur les missions de surveillance, d’expertise et de recherche de l’IRSN dans le domaine de la surveillance radiologique de l’environnement 

Sur les bases de la radioactivité, en accédant à la base de connaissance du site internet de l’IRSN