Savoir et comprendre

Incendies de forêt en août 2010 dans les territoires contaminés par l’accident de Tchernobyl

24/07/2024

Incendies sur des territoires contaminés par l’accident de Tchernobyl : quelles conséquences radiologiques en France métropolitaine ?

Dans le cadre de sa mission de surveillance radiologique du territoire, l’IRSN étudie régulièrement les conséquences en France des incendies de grande ampleur qui surviennent dans les régions d’Europe de l’Est fortement touchées par les retombées de l’accident de Tchernobyl. Cela a notamment été le cas au printemps 2020, où des incendies majeurs ont concerné l’environnement immédiat de la centrale nucléaire de Tchernobyl, notamment la zone dite « d’exclusion » située dans un rayon de trente kilomètres autour de la centrale et évacuée en 1986 . Les questions ont alors porté non seulement sur cet évènement proprement dit, mais également sur les conséquences de possibles évènements extrêmes de ce type, qu’il s’agisse d’incendies survenant en Europe de l’Est ou en France sur les zones les plus touchées par les retombées de cet accident. 
L’IRSN publie en juillet 2024 une étude consacrée à l’estimation des conséquences radiologiques en France métropolitaine des incendies survenus au printemps 2020 sur des zones parmi les plus contaminées par l’accident de Tchernobyl. Cette étude répond également à des questionnements sur les conséquences du scénario le plus pessimiste que l’on pourrait imaginer en matière d’incendie qui surviendrait en Europe de l’Est ou en France sur les zones les plus touchées par les retombées de cet accident. 
Cette étude comporte ainsi trois volets : le premier évalue les conséquences en France des incendies de 2020 ; le second traite d’un scénario extrême d’incendie autour de la centrale de Tchernobyl et de transfert des masses d’air contaminées jusqu’en France ; enfin, le troisième volet estime les conséquences que pourrait avoir un incendie survenant dans une des zones boisées françaises parmi les plus touchées par les retombées de l’accident de Tchernobyl. 

Evaluations des conséquences en France métropolitaine des incendies de 2020 en Europe de l’Est

Les évaluations ont été réalisées en combinant l’interprétation de résultats de mesures et l’utilisation de modèles numériques. Parmi les mesures réalisées en France à la suite de ces incendies, seules les activités volumiques de 137Cs dans l’air pouvaient être distinguées du bruit de fond. Les concentrations de ce radionucléide ajoutées par cet évènement dans les denrées et estimées dans cette étude par modélisation, sont très inférieures aux concentrations relevant du bruit de fond lié à la rémanence dans les sols français des retombées des essais nucléaires et de l’accident de Tchernobyl.
Les doses efficaces, toutes voies d’exposition confondues, ont été insignifiantes : très inférieures à 1 nSv (ou 10-6 mSv).

Le plus pessimiste scénario d’incendie survenant près de la centrale ukrainienne

Le scénario a été conçu, d’une part sur la base des observations faites en 2020, d’autre part sur la sélection de la séquence météorologique la plus pénalisante vis à vis du transfert des masses d’air vers la France, observée au cours des dix dernières années. Dans ce scénario, il a été considéré que 80% de la zone d’exclusion, soit toute la partie de cette zone qui n’a pas été touchée par les incendies de 2020, pouvait brûler en une quinzaine de jours durant lesquels les conditions météorologiques sont celles de la séquence météorologique la plus pénalisante.
Les activités volumiques de 137Cs dans l’air en France, consécutives à ce scénario resteraient inférieures à 1 mBq/m3(1). Avec des concentrations ajoutées de l’ordre de 20 à 100 mBq/kg, ce scénario pourrait conduire à doubler temporairement, pour les denrées les plus sensibles que sont les légumes-feuilles (salades, épinards…), les concentrations de 137Cs correspondant au bruit de fond. Pour atteindre durant quelques jours le Niveau de contamination en 137Cs Maximum Admissible quant à la commercialisation d’une denrée après un accident nucléaire, il faudrait des activités dans l’air de l’ordre de 10 000 fois supérieures à celles estimées dans le pire scénario retenu dans la présente étude. Les doses efficaces pour la population adulte, résultant de ce scénario, seraient extrêmement faibles de l’ordre de 1 à 10 nSv.

(1) : Cette valeur est environ 1 000 fois plus faible que celles mesurées dans l’Est de la France au début du mois de mai 1986 lors des retombées de l’accident de Tchernobyl (valeur maximale de 5,5 Bq/m3 mesurée à Verdun le 1er mai 1986), mais elle est 1 000 à 10 000 fois supérieure à celles mesurées dans l’air actuellement. 

Scénario d’un incendie survenant sur une des zones de France métropolitaine parmi les plus touchées par les retombées de l’accident de Tchernobyl

La zone concernée par l’incendie est une surface boisée du sud de la France dont les activités de césium 137 dans les végétaux (arbres, arbustes), la litière forestière et les sols, avaient été mesurées lors d’une étude antérieure. Un incendie sur cette zone pourrait conduire à une forte augmentation de la concentration de 137Cs dans l’air au cœur même du brasier, mais la contamination des denrées, cultivées à proximité immédiate, qui en résulterait, resterait trop faible pour être distinguée du bruit de fond. Les doses seraient quant à elles insignifiantes, que ce soit pour le pompier intervenant sur cet incendie et exposé à l’inhalation de poussières, ou pour la population avoisinante principalement exposée à l‘ingestion de denrées soumises au dépôt de cendres contaminées. Les doses calculées (2) sont de l’ordre du millionième de la dose de 1 mSv qui est la dose limite pour l’exposition du public telle que définie par le code de la santé publique.

(2) : Compte tenu des incertitudes de calcul, les résultats des estimations faites dans cette étude ne peuvent être interprétés que comme des ordres de grandeurs.

Cartographies relatives aux évaluations des conséquences en France métropolitaine des incendies de 2020 en Europe de l’Est

 

Incendies d’avril 2020
Incendies d’avril 2020 : cartographie des dépôts de césium 137 (mBq.m-2) obtenue par modélisation
Incendies d’avril 2020
Incendies d’avril 2020 : cartographie de la contamination des légumes-feuilles en césium 137 (mBq.kg-1)
Incendies d’avril 2020
Incendies d’avril 2020 : cartographie de la dose efficace totale, pour le Cs 137 et le Sr 90, toutes voies d’exposition confondues (nSv), obtenue par modélisation